7e bataillon de l’Ain

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21ème bataillon des réserves ou 7ème de l’Ain :

 

Date de formation : selon Belhomme, il fut formé le 21 septembre 1792[1].

Formation :

Alors que tous les auteurs spécialisés dans les volontaires nationaux stipulent qu’il n’y a jamais eu de 7ème bataillon de l’Ain. Nous avons cependant trouvé trace de ce bataillon. Notamment par rapport aux travaux d’Henri Schindler ayant travaillé sur L’état militaire de l’Empire français, an 13 et sur L’histoire de tous les régiments depuis les premiers temps de la monarchie jusqu’à nos jours par M. Brahautet, le capitaine Sicard. Ce bataillon a été incorporé en première formation dans une demi-brigade de l’Yonne, elle-même incorporée en deuxième formation dans la 67ème demi-brigade et les 2ème et 3ème bataillons dans la 16ème demi-brigade de ligne devenue en 1803, 16ème régiment de ligne.

Le problème du 7ème de l’Ain, est qu’il s’agit d’une histoire inachevée. Sa formation fut interrompue par l’urgence de la situation militaire dans la deuxième moitié de l’année 1792. Il n’eut pas d’existence réelle, mais parmi certains documents des archives de l’Ain, nous trouvons trace de lui au détour d’un document de secours aux familles, ou comme nous l’avons vu d’après les travaux d’Henri Schindler. S’il connut un début de formation sur le front, il fut rapidement incorporé dans d’autres unités. Sa formation avortée fut également stoppée par une liquidation rapide des compagnies qui auraient pu le former. C’est une véritable enquête que nous avons dû mener pour démêler les fils de cette histoire.

Pendant les guerres révolutionnaires, les bataillons de ligne comme de volontaires comptaient une compagnie d’élite dite de grenadiers. Cette compagnie formée d’hommes plus grand et plus fort, était armée en plus de son fusil et de sa baïonnette, d’un sabre dit de grenadier. Le reste de l’infanterie n’ayant pas cette arme supplémentaire, il fallut attendre l’armée impériale de Napoléon pour que les fusiliers d’infanterie fussent aussi équipés du « sabre briquet ». Ces compagnies de grenadiers, furent souvent réunies, dans ce qui a été appelé « les bataillons de grenadiers réunis ». Le maréchal Oudinot commanda même une division complète de ces grenadiers réunis, durant la campagne de 1805, qui se termina par la bataille d’Austerlitz. Les grenadiers de l’Ain, furent donc amenés à être séparés de leur unité. Le premier cas connu est celui de la compagnie de grenadiers du futur général Joubert du 3ème de l’Ain. Ce bataillon ayant rejoint, l’armée du Rhin, la compagnie de grenadiers en fut détachée pour être groupée avec des grenadiers du Bas-Rhin. L’histoire de cette compagnie se confondit dès lors dans celle du 1er bataillon des grenadiers du Bas-Rhin. A l’armée des Alpes, le regroupement des compagnies de grenadiers s’opéra tardivement. C’est le général Kellermann qui ordonna la réunion des grenadiers pour former trois bataillons de grenadiers. L’ordre appuyé par les représentants du peuple Dumaz et Réal fut passé et exécuté en avril et mai 1795. Le 1er bataillon fut formé à Saint-Jean-de-Maurienne, le 2ème bataillon à Moutiers et le 3ème bataillon à Barcelonnette. Le 2ème bataillon abrita les compagnies de grenadiers des 4ème et 6ème bataillons de l’Ain. Nous ne savons pas ce que devînt par la suite cette unité[2]. Après cette parenthèse revenons à notre bataillon.

Au printemps 1792, alors que le département de l’Ain forma et équipa trois bataillons de volontaires et un bataillon de grenadiers volontaires, les compagnies de grenadiers nouvellement formées furent immédiatement envoyées aux armées. Il semble d’après le registre des délibérations du département, que ces compagnies furent dirigées vers le camp de Soissons devant couvrir Paris menacée par l’invasion étrangère[3]. En août 1792, le capitaine Mabiez de Rouville[4], qui devint lieutenant-colonel, conduisit ces quatre compagnies de grenadiers de l’Ain en Champagne. Le 30 août 1792, le district de Châtillon évoqua ce départ et le sort des compagnies de volontaires alors formées à Bourg :

« Une compagnie de volontaires du district de Chatillon les Dombes a été désorganisée dans le département. Quelques soldats se sont incorporés aux compagnies conservées et le plus grand nombre ont resté fidèle au capitaine qu’ils avoient nommés sous les yeux des administrateurs du district de Châtillon et se sont retirés chez eux honteux de ne pouvoir plus être utile à leur patrie.

Des six compagnies qui sont à Bourg quatre sont destinées pour le camp de Soissons, et les deux autres sont ajoutées aux trois bataillons qui sont autorisées dans le département. La compagnie d’Este a choisie le bataillon qui est à Montluel et celle de Joubert  a choisi celui de Toissey. Il reste donc celuy de Pont de Vaux auquel ont à point joint de compagnie.

Les volontaires de la compagnie de Châtillon prient donc en conséquence du déficit de la compagnie de Pont de Vaux le directoire du département de leur permettre de venir à Bourg avec d’autres citoyens qui ont promis se joindre à eux pour être sous ses yeux organisées en compagnie et être joint au bataillon dont l’état-major est à Pont de Vaux lequel se trouveroit au même complet que ceux de Toissey et Montluel ».

Nous avons ainsi par cette pièce la confirmation du départ pour le camp de Soissons de quatre compagnies, tandis que deux autres furent versées dans les bataillons en cours de formation. La compagnie du capitaine d’Este fut versée dans le bataillon de Montluel, celle du capitaine Joubert dans celui de Thoissey[5]. Une compagnie formée à Châtillon fut en partie démembrée et les restes demandèrent leur incorporation dans ce que cet homme appelle le « bataillon de Pont-de-Vaux ». Le document signé du volontaire Roux amena une réponse positive du département en date du 31 août 1792.

Lors de la formation des volontaires de 1792, trois bataillons furent constitués rapidement : les 4ème, 5ème et 6ème de l’Ain. En parallèle, le bataillon de grenadiers réquisitionné par l’armée du Midi de Montesquiou-Fesenzac connu lui aussi un début de formation. Mais devant l’urgence d’envois des renforts, suite à l’invasion des frontières françaises et la percée des coalisés en marche sur Paris, quatre compagnies de « grenadiers » furent envoyées en renfort au camp de Soissons avant la formation réelle du bataillon de grenadiers. Plus tard et si nous en croyons Eugène Deprez et son ouvrage sur les volontaires nationaux de 1791 à 1793, trois autres compagnies furent également envoyées au front et dirigées vers la Champagne. Voilà sans doute l’explication de la non-formation de ce fameux bataillon de grenadiers. Pour ce qui concerne notre 7ème, nous savons que quatre compagnies de l’Ain furent incorporées dans le 21ème bataillon de réserve. S’agit-il des quatre compagnies de grenadiers de renforts ? Nous savons que le 8ème de l’Ain fut formé tardivement et péniblement, dans la place de Belfort avec des compagnies de l’Ain et des compagnies d’autres départements. Que sont devenues les trois compagnies évoquées par Eugène Deprez ?

Après une longue enquête, nous pouvons affirmer que le 21ème de réserve fut considéré dans l’ordre de filiation des bataillons du département comme le 7ème de l’Ain. Toutefois lors de la formation tardive du  8ème bataillon de l’Ain, le 7ème n’ayant de fait jamais était formé et aucun bataillon n’ayant porté véritablement ce numéro, le 8ème de l’Ain aurait dû porter le numéro 7. Nous savons qu’il ne fut pas formé à la date prévue[6]. Dans la précipitation de l’été et de la fin de l’année 1792, les compagnies de grenadiers et autres compagnies en rassemblement à Bourg avaient été envoyées au camp de Soissons. N’étant plus assez nombreuses pour former un bataillon, les compagnies restantes participèrent à la création des 4ème, 5ème et 6ème de l’Ain. Mais la formation du 21ème bataillon de réserve avec une bonne proportion de volontaires de l’Ain pouvait être considérée comme la formation d’un 7ème de l’Ain. Ainsi lorsque le général Vieusseu[7] ordonna que le 8ème porte le numéro 8 au lieu du 7, c’est que dans l’esprit des contemporains, le 7ème avait eu une existence même sur le papier. Nous trouvons effective une autre preuve de sa formation passagère qui répond définitivement à cette question. Le dossier de la Légion d’honneur du chef de bataillon Louis-Jérôme Ducret nous indique : « né le 28 février 1773 à Confort département de l’Ain, entré au service comme volontaire dans le 7ème bataillon de l’Ain devenu 21ème de volontaires nationaux qui a fait partie de la 67ème demi-brigade d’infanterie de ligne ».

Il ne subsiste désormais plus de zones d’ombres par rapport à la filiation du 21ème même si la confusion reste importante, même pour les contemporains. D’autant que la perturbation de cette filiation entraina une confusion entre les deux 8ème bataillons de l’Ain : les 8ème et 8ème bis. Formés à peu près aux mêmes dates, l’ordre du général Vieusseu interféra dans la filiation des bataillons de l’Ain. Le 7ème devint 8ème et ce qui aurait dû être le 9ème bataillon de l’Ain reçut finalement le numéro 8 bis. Dès lors il s’agit d’une quadruple confusion possible : le 21ème de réserve considéré comme 7ème de l’Ain… ainsi que le 8ème. Et le 8ème bis de l’Ain pouvant être confondu avec le 8ème… Mabiez de Rouville, lieutenant-colonel du 8ème, indiquait lui-même cette confusion entre les 8ème et 8ème bis[8]. Enfin, la série 108 J, des AD de l’Ain, elle-même photocopie des pièces des archives de Vincennes, font état d’un 7ème de l’Ain, et rassemble des documents correspondants au 8ème bataillon de l’Ain.

Historique :

 1792 :

Nous pouvons donc suivre désormais la carrière du 21ème des réserves avant qu’il ne fut incorporé en premier amalgame. A la date du 15 décembre, le bataillon fit partie des troupes de garnison de Bruxelles sous le commandement du gouverneur Goguet. Il comptait un effectif important de 748 hommes[9]. Des quatre compagnies parties en août 1792, nous trouvons trace particulièrement de deux compagnies, d’après un état de l’équipement établi par Mabiez de Rouville, capitaine commandant la compagnie de Trévoux établi le 2 septembre[10]. A cette date la dite compagnie fut formée des hommes suivants :

André Scalier sergent-major, Claude L’averlochere sergent[11], François Rivière, Benoit Frachet[12], Etienne Micard[13] et Antoine Gravillion[14] caporaux, Antoine Poncet[15], Jean-François Prost[16], Joachim Feuilier, Thaumas Bidon, André Fauchon, Philibert Jeneurit, Antoine Bellet, François Billion[17], Simon Thauraux, Sébastien Charremeton[18], Jacques Prost[19], Jean Chollet, Claude Verand[20], Jean Millier, Claude Gond, Jean Prost, Joseph Rainsquin, Jean-Baptiste Duque, Jean Chestre, Jacob Heirtz, Jean-Baptiste Marillier[21], Paul Raviste, Louis Clunet, François Cartellier, François Derbage, Benoit Troncy, Joseph Barme, Martin Sigu[22], Bénigne Sincyr[23], André Jouvre, Jean Jallon[24], Jacques Moufrat, Pierre-Louis Rochet, Martin Coudeal, Jean Coupatche, Joseph Mestre, Jean-Martin Avraye, Lorant Chemal, François Coulle, Jean Couler, Georges Hebert, Etienne Roumant, Nicolas Gavot, Christophe Sieute, Jean Palaux, Toussaint Gatin, Joseph Gesared, Just Gaton, Florand Spiche, Antoine Benesbache, Claude Page[25], Antoine Hebert, Jean-François Delpeyer, Pierre Dumont, Michel Meunier, Charles Lobet, Jean Pierre, Michel Pomain, Pierre Pecard, Nicolas Brumaux, François Pété[26], Antoine Simon, Jacques Josserand[27], Louis Aruy, Claude Caprial, André Forobert, François Guillaume, Etienne-Marie Brun, François Clien, Antoine Ache, François-Joseph Jpsenphels, Jean Faufsemague, Benoit Favre, Christophe Paturel, Georges Vienmard, André Frangin, Joseph Carry, Frédéric Arthemane, Antoine Poncet, François Renard[28], Jacques Genelay, Jacques Greppe, Michel Mornin, Allemant[29], Allebert Bonnomme fusiliers.

L’autre compagnie dite de Montluel était commandée par le capitaine Buret[30]. Elle établit également un état de l’armement et de l’équipement pour chacun de ses hommes. La compagnie se composait des hommes suivants :

Benoit Turc, Jacques Compte, Claude Chervieu, Jean Canlaton, Claude Cadot, Antoine Colombet, Antoine Colard, François Dami ?, Jean Cousin, Benoit Poulet, Matthieux Dupin, Joseph Léon, Ennemond Crétin, Claude Netholon, Catherin Méau, Claude Cattet, Posmard  Racurt, Claude Crétin, Jean-Baptiste Jobert, Jean Poison, Jacques Maigre (caporal), Jean Bourdonet, Jean Gaudet, François Lavertu, Michel Lechert, Claude Thevenet, André Ganaru (caporal), Compagnon, François Deport, Moys Jemier, François Charité, Jean Pie, Claude Andréa, Antoine Courtoi, Joseph Savage, Jacques Fillion, Antoine Vernay, Dominique Soutin, François Collet, Julien Arnaud, Claude Audri, Nicolard Muneroz, François Grost, Jacques Thomas, Jean Audri, Noël Audri (sergent), Thomas Renaud, Jean Dujavourd, François Girard, Claude Perronet, , ? Thibaut, Antoine Mayert, Claude Caron, Claude Moulin, Louis Munet, Jean Roue, Antoine Genias, Henri Curtet, Jean Cochet, Michel Blaye, Benoit Bernet, Jean Cadejet (caporal), Maurice Fleuri (caporal), Pierre Meilliard, Jean Claudi, Blavelle, Charles Degabriel (tambour), Joseph Crost, Claude Huchet (sergent-major), Louis Duverge, François Bringard, Gaspart Descoeur, Joseph Juenet, Laurand Print, François Gauthier, François Charvée, Antoine Thevenet, Quoichat, Bringard, Claude Curtet, Bourdoncle, Ennemond Crétin et Pierre Four.

Le 21ème de réserve fut formé sur les arrières de l’armée du Nord, qu’il rejoignit ensuite. Le 24 décembre, suite à une lettre de l’ancien lieutenant-colonel du 2ème de l’Ain qui dénonça la désertion de quatre officiers, le bataillon reçut une adresse du département tout comme les six bataillons de l’Ain formés à cette date. Le département rappela aux volontaires de l’Ain les punitions sévères imposées aux déserteurs[31]. Ce bataillon était commandé par Mabiez-de-Rouville, ancien lieutenant-colonel du 3ème bataillon de l’Ain.

1793 :

Le 19 février, le Lieutenant-colonel Mabiez de Rouville écrivit de Bruxelles et évoqua la mauvaise situation matérielle du bataillon[32] :

« De la ville libre de Bruxelles le 19 février 1793 l’an 2e de la République Française, Citoyens municipaux, J’aperçois bien par votre lettre du 8 de ce mois l’étendue du patriotisme de mes frères et amis les citoyens de Trévoux. Aussi dès le moment de la lecture de cette lettre me suis-je empressé à faire venir chez moi les volontaires de la compagnie du fils de votre maire, qui aussi sensibles que moi ont laissé couler des larmes de la plus vive reconnaissance, et m’ont chargé de vous écrire de suite pour témoigner à tous les citoyens de Trévoux, toute leur sensibilité. Les besoins de l’armée de Dumouriez sont très grands surtout en souliers. Ceux que nous recevons du magasin ne durent quelque fois pas deux jours. Le service de cette garnison est des plus pénible. On prend quelques fois les armes 4 et 5 fois par vingt-quatre heures, pour en imposer et contenir les factieux. Recommandez s’il vous plait à celui qui a l’entreprise de souliers de donner de la meilleure marchandise et de ne pas oublier de mettre des clous aux semelles et aux talons. Le 25e bataillon et le mien n’avons pas encore reçu nos capotes, nous pensons nous en passer dans ce moment attendu le dégel survenu depuis trois semaines. Il fait assez doux dans ce moment que dans les plus beaux jours du printemps. Ce dégel a fait trouver sept émigrés qui s’étaient jetés de rage dans le canal de Bruxelles lors de l’arrivée des Français. Ils ont été enterrés la semaine dernière. Il est encore dans Bruxelles un certain nombre d’émigrés tant en cy-devants qu’en calotins, les uns et les autres ne sortent que comme les rats sauvages, et entrent dans les maisons demander l’aumône. Plusieurs de ces brigands cherchent à se placer comme domestiques chez les officiers de volontaires, un capitaine des grenadiers du cy-devant régiment Auvergne était domestique dans une auberge à Anvers, il a été reconnu par un sous-lieutenant de volontaires qui a été grenadier dans sa compagnie. Ce capitaine valet a été arrêté, il est maintenant dans les prisons de Bruxelles. L’arrivée des Français dans Bruxelles a occasionné la fuite de 10 000 émigrés dans la Hollande. Nous en tiendrons sous peu de jours une bonne fricassée. Maestrect est bloqué. Les Hollandais ont chassé de la ville environ 3 000 émigrés qui sont dans les faubourgs. Nous espérons leur faire danser la carmagnole incessamment. Le siège de cette ville a dû commencer hier. Il aurait commencé plutôt sans la faute d’un capitaine d’artillerie qui a retardé de 36 heures l’envoi d’un convoi de bombes du général de Dumouriez. Cet officier d’artillerie est maintenant dans les fers et va passer à la cour martiale. Mon frère cadet est maintenant avec son bataillon qui part demain pour Liège. Il m’a chargé de beaucoup d’honnêteté pour le citoyen maire, et de faire ses compliments de félicitations au citoyen Bouclet sur son avènement à la place d’officier municipal. J’invite les citoyens Ruf et Pété à joindre quelques peu de butin pour leurs fils dans le paquet que vous enverrez, les deux fils Ruf ont été volé chez leur oncle Vidal chez qui ils couchent. On a pris dans leur chambre jusqu’aux matelas et couvertes de leurs lits.  Il vient encore d’arriver vingt prisonniers de guerre Hollandais pris par les Français dans un poste avancé. Etat des volontaires qui ont besoin des effets dont vous me parlez : Benistant, Philibert Gilibert, Marillier, Gravillon, Jean Jalon, Allemand, François Billon, Jacques Prost, Bénigne Saint Cyr, Sigû, Jean François Prost, Bastien Charmenton, Verrand, Jean Prost, Charrin, Nerard, Poncet, Franchet. Tous les volontaires de Trévoux jouissent d’une parfaite santé. Ils vous recommandent tous leurs parents. Ils attendent ainsi (que) moi le moment de se battre contre les Keyse Reliques. Recevez en mon particulier chers concitoyens l’hommage de la plus sincère gratitude. La mort de Louis le Tyran n’a pas fait d’impression dans cette garnison, tant les volontaires ont crié bravo.Soyez toujours parfaitement convaincu des sentiments républicains de votre concitoyen. Le lieutenant-colonel commandant le 21e bataillon de volontaires de la Réserve. De Rouville ».

 P.S.

« La nouvelle se débite actuellement que la ville de Breda appartenant aux Hollandais a été par nous prise, mais je ne vous le confirme pas.Le capitaine Eustache se porte en charme, le citoyen Chaffange qui est un des plus gentils vicaires du bataillon m’a chargé d’offrir à la municipalité de Trévoux un bataillon d’honnêteté, sa femme se dispose à aller camper & bivouaquer avec nous. Le papier perd ici 54 pour cent ».

Le 1er mars, le 21ème de réserve fort 735 hommes, était toujours en garnison à Bruxelles[33]. Alors que l’offensive autrichienne débuta dès le 2 mars, le bataillon fut appelé en renfort par le général Dumouriez. L’armée française dut se replier et se concentra vers Tirlemont. Cependant le 16 mars, la position de Tirlemont ayant été perdue, Dumouriez passa à l’attaque. Après un violent combat les Français reprirent pied dans Tirlemont mais furent attaqués par l’armée autrichienne, le 18 mars. Ce fut la bataille de Neerwinden, perdue par l’armée française et qui scella l’évacuation de la Belgique par les Français. Mabiez de Rouville qui commanda le 21ème bataillon des réserves, nous raconte la bataille[34] :

« Du bivouac de Tirlemont et Louvain le 20 mars 1793, an II de la République, Citoyens compatriotes, j’avais annoncé, il y a quelques jours,  la seconde prise de la ville de Tirlemont aux citoyens administrateurs de votre district. Nous avons pris livré batailles aux autrichiens. Elle a été des plus sanglantes et nous avons gagné leurs postes. Le 18 de ce mois, il a fallu gagner le village de Kimetix, porté intéressant. Le feu a été des plus dangereux. L’armée autrichienne a été attaquée par le flanc droit et par le flanc gauche. Il a commencé à 9 heures du matin. Au moment de notre marche cent hommes de mon bataillon sont arrivés commandés par le capitaine Eustache. Il a fallu porter secours au village ci-dessus, et soutenir le poste que nous avions gagné. Le feu a été mis par les bombes et boulets rouges, nous nous sommes pour lors avancés. Les autrichiens, en faveur de leur habitude, étaient postés sur des hauteurs très avantageuses. Leurs canons qui étaient en nombre considérable faisaient un feu du diable sur la grande route que nous tenions. Nous sommes incontinent entrés dans un pré pour soutenir des pièces de position de 8 et de 12. Mon bataillon était seul, il a soutenu le feu des Keyse Reliques[35], pendant une heure et quart. Nous avons ensuite chargé l’ennemi qui s’est reployé. Nous n’étions soutenu que par 4 escadrons de cavalerie mais l’artillerie autrichienne, beaucoup plus forte que la nôtre et étant soutenue d’une nombreuse cavalerie, nous a fait battre en retraite. La cavalerie, qui devait nous protéger dans cette retraite nous a coupé l’avance et s’est mise au grand galop. Cette cavalerie a travaillé en peureux. Mon bataillon et le 54ème ci-devant Roussillon, a en conséquence été chargé indignement. Monsieur Dumesnil ci-devant capitaine au régiment de Guyenne, que vous avez eu à Trévoux, actuellement maréchal de camp, commandait notre brigade. Il a admiré la valeur avec laquelle mon bataillon a fait son feu et opposé sa résistance. Il a en outre admiré le sang-froid et le courage du capitaine Eustache du capitaine des Grenadiers Micard de Trévoux. Jamais feu n’a été plus formidable suivant le dire des vieux guerriers. Les hussards des Ardennes et le 2ème régiment de Chasseurs nous ayant abandonnés, ces deux capitaines ont rallié le peu de monde qu’ils avaient. Néanmoins, il a fallu fuir à grand pas, le feu et la charge des dragons de la Tour, que nous avons essuyé, m’ont fait perdre beaucoup de monde. J’ai fais faire trois appels et j’ai perdu dans mon bataillon 250 hommes ».

« Les boulets, la mitraille et les coups de sabre nous tombaient dessus comme la grêle et quoi qu’on puisse vous écrire sur le nombre de pertes que j’ai essuyé, n’écoutez que ce que je vous raconte parce que ce n’est que la pure vérité et que tout le matin et soir les adjudants me rendent compte des mouvements du bataillon. Le fils Hugo se trouve sergent-major de la Compagnie d’Eustache qui est notre porte-drapeau, s’est montré en César. Il a été entouré par les dragons de la Tour qui lui ont crié plus de dix fois « drapeau rends toi, tu es pris, tu es mort ! ». Il s’est défendu avec la lance de son drapeau et s’est sauvé avec plus de dix coups de pistolets lui ont été tiré dessus. La droite de notre armée a entièrement détruit trois régiments de cuirassiers autrichiens. De ces trois régiments, 6 hommes s’en tirent dont le sapeur. Le nombre de morts de cette journée est considérable, la plus grande perte a été la droite de l’armée, le centre n’a pu donner à cause de la bonne position de l’ennemi.

Le fils Buret de Montluel ainsi que trois autres capitaines de mon bataillon ont été hachés. Le fils Page, de Genay a été tué d’un coup de feu. Le fils Ruy, dit Blondin, a été sur le point d’être hâché à la gorge, un dragon de la Tour lui dit, « donnes-moi ton sac et ton fusil », après s’être dénué de cartouches, et ne pouvant rien faire, il donna son sac et son fusil et le dragon lui dit actuellement « fous moi le camp ! », son frère a été entièrement dévêtu… Nous avons perdu dans cette journée un officier général et cinq aides de camp. Le général Valence a été blessé par 4 coups de sabre, le général Lhier a été blessé d’un coup de mitraille. Partie de notre armée est en déroute, le général Dumouriez fait tous ses efforts pour tout rallier. Beaucoup de volontaires sèment la peur, des officiers même, et beaucoup s’en vont. On ne voit sur la route que des fuyards, et se cela continue nous n’aurons plus d’armée. Je pleure et je gémis maintenant sur le sort de nos armes, les ennemis sont nombreux, beaucoup de cavalerie et d’artillerie. Ces bougres-là obéissent mieux au commandement que nous ! Dans des moments de bataille, des jeans foutres de volontaires et d’autres veulent faire des motions, on ne veut pas écouter on leur dit obéissez aux ordres des généraux et de vos chefs, nous avons droit de parler disent-ils, et les manœuvres et expéditions souvent manquent. Beaucoup d’aides-de-camp dans cette fameuse journée du 18 n’ont pas fait leur métier, la plupart de ces bougres-là ne valent rien pour le feu et ne pensent qu’à leurs beaux chevaux et aux femmes et si ces muscadins n’eussent pas craint de porter dans le feu les ordres de leurs généraux, l’affaire se serait autrement passée. J’ai vu moi-même et tous les dombistes vous l’attesteront, deux généraux venir nous commander, courir dans tous les bataillons, et n’avoir point d’aides-de-camp. Le 54ème régiment n’a rapporté de son drapeau que la cravate. Sans aucun fard pour mon bataillon c’est lui et le 54ème régiment qui a mieux soutenu. Les autres bataillons se sont mis en déroute et notre retraite n’a pas été des mieux observée. Je gémis citoyens, sur le sort de nos armées, voyant une partie de l’armée s’enfuir. J’ai peur que nous ne soyons forcés d’abandonner le fruit de nos conquêtes. Je ne saurais vous exprimer nos douleurs, je viens d’apprendre que beaucoup de parisiens viennent avec des grandes piques, ils feraient beaucoup mieux de venir avec des grands canons et de la mitraille.

Votre concitoyen, le lieutenant commandant le 21ème bataillon De Rouville.

PS : j’oubliais de vous dire que ces mâtins de Keyse reliques crient et hurlent comme des loups quand ils se battent. Nous avons perdu à la gauche huit pièces de canons et cinq caissons ».

Après la bataille, le 21ème de réserve qui comme nous le voyons à cette lecture s’était battu avec courage, dut se replier. La retraite de l’armée française se fit dans le plus complet désordre. Cependant les Autrichiens épuisés par une bataille longtemps indécise, et avec leur lenteur habituelle, ne poursuivirent pas les Français. Le bataillon put se replier doucement, d’abord sur Valenciennes, où Mabiez-de-Rouville manqua d’être fait prisonnier, puis sur Lille. Le 5 avril, Mabiez de Rouville écrivit à nouveau à la municipalité de Trévoux pour raconter les événements majeurs qui s’étaient déroulés lors de la trahison du général Dumouriez[36] :

« De Valenciennes à 6 heures du Soir, l’an 2ème de la République, Je me hâte de vous informer de l’état de l’armée. Dumouriez quoique cassé de sa place de général par le commissaire de la Convention qui sont ici, a passé hier en revue la majeure partie de l’armée dont une partie a prêté serment entre ses mains de ne pas le quitter. L’autre partie quitte et se rend dans nos places fortes. Il a ordonné ce matin que notre parc d’artillerie eut à lui rester. Notre artillerie est conséquente et a obéi aux ordres du général Ferraud qui commande cette place, au lieu d’obéir à ceux de Dumouriez et toute notre artillerie, chose importante vient heureusement de rentrer.Toute nos troupes légères est rendue à Dumouriez, beaucoup de nos bataillons ne sont pas de cet avis. Hier le 3ème bataillon de l’Yonne a tiré sur Dumouriez et sur son escorte, 4 hussards et un de ses aides de camp ont été tués près Saint-Amand avec 8 chevaux. Le cheval de Dumouriez n’a pu sauter un fossé, il en est descendu, s’est mis dans le fossé et s’est sauvé. Plusieurs de ses chevaux ont été pris. Je viens malheureusement d’apprendre que plusieurs régiments et bataillons se disposent à la suivre. Aujourd’hui à Saint-Amand, je me répète, il a fait renouveler le serment qu’une partie de l’armée lui avait prêté hier de toujours le reconnaître pour général et de le suivre partout où il irait. Il était pour lors escorté du Colonel de Cobourg Dragons et de plusieurs officiers autrichiens et troupes légères françaises. La garnison de Valenciennes est consternée. Cette nuit le camp de Maulde sera levé pour renforcer celui de Famars qui est en arrière et toutes les places fortes. Mon bataillon est par ici, on se tient sur la défensive, les Kaisers Reliques sont près de nous et nous craignons que la plupart de nos frères d’armes mal instruits se battent contre nous. Demain, quoique malade, je pars pour Lille où est mon bataillon. La majeure partie du du camp de Maulde porte la cocarde blanche. Nos troupes légères boivent à 2 lieues d’ici avec celles autrichiennes. Je ne puis vous en dire davantage, la générale bât depuis 10 minutes, toute la garnison et la bourgeoise sont sur les remparts, j’écrie mal, la poste va partir ».

Après quelques combats d’arrière-garde les forces françaises durent laisser les Autrichiens investir Valenciennes et Condé. Nous apprenons que le 21ème de réserve avait été renforcé de plusieurs Allemands de l’ancien régiment, ci-devant Royal-liégeois. Vers le 9 avril, le 21ème des réserves dut finalement se retirer dans Lille, après les événements de la trahison du général Dumouriez. Mais laissons Mabiez-de-Rouville nous narrer les aventures du 21ème depuis la bataille de Neerwinden[37] :

« Lettre aux administrateurs du district de Trévoux. De la ville de Lille le 17 avril 1793, l’An II de la République.

Citoyens compatriotes, Je m’empresse, comme chose essentielle à mon devoir, à répondre à la lettre du 5ème de ce mois, que les citoyens de Trévoux qui ont fourni des défenseurs de la Patrie ne portent pas partout le deuil. J’ai perdu beaucoup de monde, il est vrai à l’affaire du 18 et non à celle du 19. Les vainqueurs de Jemmapes assureront à la France entière que la journée du 18 a été beaucoup plus sanglante : la droite, le centre, la gauche et les flanqueurs de droite et de gauche ont tous donné. Le nombre de morts et blessés, comme je vous l’ai précédemment marqué, a été des plus nombreux. Je me rappelle que j’ai marché pendant une demi- lieu sur les morts, la route et les champs en étaient couverts. Les volontaires que j’ai perdu sont : Pété, Josserand de Massieux, Gilibert, Page de Genay (ce dernier je crois a été fait prisonnier), Marillier, plusieurs allemands du cy-devant Royal Liégeois, les deux fils Ruf sont restés à Bruxelles pour prendre une nuit de repos chez leur oncle Vidal. Lorsque l’armée se retirait, j’avais donné ordre aux officiers et sous-officiers de ne laisser sortir personne des rangs en entrant dans la ville. Depuis ce temps je n’ai reçu aucune nouvelle. Jacques Prost dit Moriand a reçu un coup de sabre sur la tête et a eu en outre deux doigts coupés et est venu nous rejoindre le lendemain à moitié nu. Il était resté sur le champ de bataille. Il n’y a que huit jours que je suis arrivé à Lille où est en garnison mon bataillon. Il n’a pas été si faible de se laisser endormir par les embûches de notre brigand de Dumouriez. Nous avons tous de nouveau juré de mourir à notre poste en combattant pour le soutien de la République. Je suis arrivé ici dis-je, sortant de l’ambulance de Valenciennes, j’ai failli à être pris par les Kaiser Reliques qui occupaient Saint-Amant, on ne le savait pas encore à Valenciennes. Je vois un de ces bougres là sans armes, à qui je demandais en allemand si ces camarades étaient à Saint-Amant, il me répondit « Ya, Ya ! ». Je fis encore 25 pas, j’en aperçu une vingtaine qui allaient à l’eau. Je retournai bien vite bride, et ait été obligé de passer par Douai pour venir ici. Les forces de l’ennemi se portent sur Condé et Valenciennes. Hier, les tirailleurs des Kaisers Reliques et les nôtres ont fait un feu qui a duré une partie de la journée à un quart de lieue de Valenciennes. L’ennemi s’étend jusqu’aux environs de cette ville. Je montais à cheval hier avec une douzaine de chefs de bataillon. Nous suivîmes les commissaires de la Convention et les généraux pour voir les fortifications. Nous poussâmes notre démarche plus loin. Nous fûmes jusqu’à trois quart de lieues, nous aperçûmes des vedettes ennemies qui nous lâchèrent deux coups de carabines dont une balle dans le porte manteau d’un dragon, et nous nous retirâmes. Je ne crois pas que les Kaisers Reliques, ni la bande à Dumouriez veuillent entreprendre le siège de Lille, cette ville est dans un état de siège imposant, notre garnison est de 18 000 hommes. On a commencé hier à faire abattre le grand Faubourg de Fifie puisqu’il ne faut pas dans ce cas servir de retranchements à nos ennemis. Ce faubourg est une fois plus conséquent que Trévoux. Chaque bataillon fournit journellement son contingent d’hommes pour cette abolition ».

« Les habitants de ce faubourg qui sont maintenant en ville inspirent la plus grande compassion et de peine. Maintenant on ne peut en loger dans Lille, attendu que le refuge considérable des Belges et des Liégeois. Quand je me trouve assemblé avec les camarades du bataillon, nous sommes à deviner comment nous existons. Il est impossible de vous dépeindre l’intensité des bouches à feu qui nous vomissent dessus. Ils ont tiré trop haut et trop bas, nul individu n’aurait échappé. Les volontaires de la compagnie Eustache se sont battus comme des vieux suisses ; Gonnet de Trévoux a été renversé par un boulet qui a coupé en deux le canon de son fusil. Ce volontaire ne s’est point étonné, s’est tranquillement relevé, a été prendre le fusil d’un corps mort, s’est remis à son rang et a continué son feu comme auparavant. Dîtes s’ils vous plait aux citoyens composant le district que les volontaires Gravillon et Frachet et Jean François Prost ont rejoint, mais qu’il n’est pas vrai, comme on le leur a dit que le fils Charenton avait fait la sottise comme les ci-dessus nommés. Ce jeune homme n’a pas quitté une minute son drapeau, se comporte bien et s’est bien battu. Frachet et Gravillon ont été cassés de leur place de caporaux. Le fils Renard de Trévoux qui a eu la lâcheté de déserter en même temps, n’est point encore reparu. Il travaille, m’a-t-on dit, dans une boutique de Paris. Si je savais sa section je l’aurai bientôt fait rejoindre. Si par hasard il allait à Trévoux, je vous prie de le faire rejoindre par des mains sûres. Le fils Nugoz vient d’être fait officier et Laverlochère lui a succédé.

Tous nos dombistes jouissent d’une parfaite santé, que leurs parents soient tranquilles, je les verrai tous aujourd’hui et les engagerai à leur donner incessamment des nouvelles. Je ne sais si par mes précédentes, je vous ai marqué comment nous appelaient les autrichiens quand ils nous chargeaient ? Ils nous appelaient « assassineurs de Roy », « mangeurs de papiers », « fondeurs de cloches ». Ces mâtins-là hurlent comme des loups quand ils se battent. Ils sont toujours saouls d’eau de vie. Je me ferais toujours un plaisir de vous instruire des mouvements de guerre qui se passent autour et devant moi. Je prie les citoyens Longin et Bouclet le patriote, de recevoir mille compliments affectueux.

Daignez, citoyens municipaux, m’instruire de temps en temps des nouvelles de mon cher pays. Je suis avec les sentiments de fraternité. Votre concitoyen le Lieutenant-Colonel commandant le 21ème bataillon des Volontaires de la Réserve.

Rouville

PS : le capitaine Eustache à la fièvre depuis trois jours mais je crois que ce ne sera rien ».

Le 28 mai, le 21ème de réserve était toujours en garnison à Lille, localité d’où le lieutenant-colonel Mabiez de Rouville écrivit une nouvelle lettre à la municipalité de Trévoux[38] :

« Plusieurs négociants de cette ville demandèrent hier à comparaître au conseil de guerre où je suis membre, ils nous représentèrent différentes lettres venant de Dunkerque par lesquelles on leur annonçait que le Roi d’Angleterre venait d’être destitué, et que l’infâme scélérat de Pitt avait été assassiné, et qu’une députation du parlement de Londres était en marche pour aller à la Convention Nationale de France, pour de suite négocier et faire un traité d’alliance. Cette nouvelle se répand aujourd’hui avec profusion. Elle est trop belle pour que nous puissions de plein vol y ajouter foi ».

Si la nouvelle est vraie, nous pourrions pour le coup être plus sûr que jamais de faire danser la carmagnole aux brigands qui nous environnent et être sûr aussi de rentrer dans la Belgique du côté où je suis et par Ostende. Valenciennes est bloquée, nous ne pouvons plus communiquer par deux grandes routes avec Douai à cause de la reprise d’Origier. Les ennemis s’étendent sur les grands chemins et y font des horreurs en faveur de l’habitude, non seulement sur les soldats mais encore que tous les passants quelconques. L’armée attend le général Custine avec le plus grand empressement, j’ai reçu seulement hier les chemises, bas et souliers que vous m’avez adressés pour nos braves volontaires. Aussi sensibles que reconnaissants, ils m’ont tous individuellement chargé de vous témoigner tout ce que leur cœur ne peut exprimer. J’ai reçu aussi le même jour le ballot que m’a adressée la société des sans-culottes de votre ville. Je n’ai distribué qu’une partie de ce butin, les volontaires ont maintenant ce qu’il leur faut et je ne distribuerai le reste qu’à fur et à mesure de besoin. […] J’ai moi-même passé la revue du butin de la compagnie de Trévoux, et j’ai aperçu que plusieurs volontaires des environs manquaient de butin. Je leur en ai donné mais trois motioneurs de Trévoux ont été jaloux de ce fait, ont beaucoup murmuré de voir leurs camarades en recevoir, se sont livrés en propos contre moi en mon absence, et ont dit qu’ils allaient écrire à la municipalité de Trévoux. Je me suis enquis des faits, et les ai fait mettre à la salle de discipline pour quelques jours. Il nous arrive de temps en temps des déserteurs ».

Il résidait encore dans cette localité à la date du 7 septembre. Mabiez de Rouville donna quelques courtes nouvelles de la situation militaire dans le secteur de l’armée du Nord[39] :

« Nous avons battu cette nuit nos brigands d’ennemis. Nous avons pris la ville d’Ypres et le gros village de Doperingue. Il ne vaut pas la peine de parler de notre perte, elle est très petite, mais un nombre conséquent des satellites de nos tyrans a mordu la poussière. Les prussiens depuis quelques jours se sont retirés. On assure d’un autre côté que le tyran prussien va se retirer pour se battre contre le tyran autrichien, voyant qu’il n’a rien à gagner sur nous ».

1794 :

Il se trouvait toujours à l’armée du Nord le 3 juillet 1794, sous le commandement de Jourdan, division Souham, effectif de 825 hommes.

Embrigadement/amalgame :

1ère formation :

Le 21ème des réserves resta à l’armée du Nord et il fut amalgamé en première formation dans la demi-brigade de l’Yonne en l’an II. Cette demi-brigade fut composée d’éléments du 2ème de l’Yonne qui avaient été incorporés dans la 67ème de première formation et par le 7ème bataillon du Nord qui avait été incorporé dans la 16ème demi-brigade de première formation[40].

2ème formation :

Le 20 février 1796, la demi-brigade de l’Yonne fut à son tour amalgamée en seconde formation dans les 10ème et 23ème demi-brigades.

État-major

Noms Grades Unité
Mabiez de Rouville Lieutenant-colonel 21ème de réserve
Piquet François-Marie[41] Quartier-maître Etat-major
Buret Capitaine ?
Eustache[42] Capitaine ?
Hugo Sergent-major ?
Micard[43] Capitaine Compagnie des grenadiers

Documents :

Saint-Nizier-le-Bouchoux, 25 septembre 1792 : un don patriotique pour équiper les volontaires de 1792 :

« Monsieur le cher ami, Je vous prie au nom de notre ancienne amitié de vouloir me servir l’offrande que je viens de faire de mes fusils, gibernes, sabres et habits faittes je vous prie que le bienfait ne tombe pas dans l’oubli. Je place mes intérêts dans vos mains, bien persuadé de vos bons procédés à mon égard.

Je cru avoir le plaisir de vous voir dans mon dernier voyage à Bourg, vos grandes occupations me priverent de cet avantage, je vit monsieur votre frère qui me promit d’être l’interprète de mes sentiments auprès de vous et de vous faire offre d’un ??? et ce à votre réquisition. J’ai l’honneur d’être avec le plus sincère attachement, Monsieur le cher ami votre très humble et dévoué serviteur Berard ».

« Saint-Nizier le 25 septembre 1792 l’an 4ème de la liberté et le 1er de l’égalité, Monsieur,

Au commencement de la révolution jequipai et armai douze gardes nationales de la paroisse de Saint-Nizier ; sont disposés en ce moment à servir la patrie, je fis part audit époque de leur zèle à Messieurs les administrateurs du département. Le zèle s’est ralenti pour la plus part, il en sera trouvé parmi les douzes que cinq de bonne volonté qui se sont enrollés auxquels j’ai laissé leurs habits.

Toujours disposé à employer tous les moyens en mon pouvoir pour le maintien de notre liberté et égalité je joins aux dire fusils et gibernes, sept habits et huit sabres que je vous fais passer, faitte sil vous plaie Monsieur agréer mon offrande et assuré Messieurs vos collègues de mes sentiments à servir la chose publique dictés par le patriotisme le plus pur de votre dévoué Berard »[44].

 

Portrait :

Mabiez-de-Rouville, s’engagea au régiment de Quercy-cavalerie, 5ème de chevau-léger (1784). Il devint brigadier (1785), congédié (août 1786). Membre de la Société populaire des Amis de la Constitution de Bourg. Major de la Garde nationale de Trévoux (février 1790). Commandant de la Garde nationale de Trévoux (mars 1791). Capitaine dans le 3ème bataillon de l’Ain (3 août 1792). Lieutenant-colonel du bataillon (novembre), puis du 21ème bataillon de réserve. Servit à l’armée du Nord. Il était à Schelestat (25 novembre), puis à Bruxelles (19 février 1793). Se distingua lors de la défaite de Neerwinden (18 mars) et bivouaqua entre Tirlemont et Louvain les jours suivants. Les officiers du 3ème bataillon de l’Ain lui délivrèrent un certificat de civisme (12 mai).  Admis à la société des Sans-culottes de Trévoux (10 décembre). Se distingua encore à la bataille de Courtrai (11 juin 1794), puis au siège de Nimègue. Il repoussa une sortie de l’ennemi après lui avoir mis hors de combat environ 300 hommes. Incorporé dans une demi-brigade de l’Yonne comme chef de bataillon (3 juin 1795), il passa dans la 16ème demi-brigade de ligne suite à l’amalgame (20 février 1796). Armée de Sambre-et-Meuse, blessé d’un boulet à la cuisse droite et au pouce de la main gauche à la bataille de Neuwied (18 avril 1797). Nommé chef de brigade provisoire à la 16ème de ligne (26 avril 1800). Embarqué en 1804 et 1805 sur l’escadre commandée par l’amiral Villeneuve. Chevalier de la Légion d’honneur (11 décembre 1803), officier de la Légion d’honneur (14 juin 1804), admis à la retraite (31 mai 1807), retiré à Trévoux (1809).

Article de Laurent B.

sehri

[1] Belhomme, Histoire de l’infanterie en France.

[2] Krebs et Moris, Campagnes dans les Alpes, tome 2, p. 220.

[3] AD de l’Ain, 2 L 30.

[4] Il s’agissait de Jean-Baptiste Mabiez-de-Rouville né vers 1757.

[5] Il s’agit peut-être du capitaine Guillaume Joubert, qui commanda plus tard la 9ème compagnie du 6ème bataillon de l’Ain, la compagnie des grenadiers du bataillon.

[6] Son embryon fut envoyé en garnison à Belfort, puis formé tardivement en guerre durant l’été 1793 avec des recrues d’autres départements.

[7] Jean-Louis de Vieusseux (1754-1817), cadet au 94ème (1773), sous-lieutenant (1776), lieutenant (1779), campagne de Genève 1782-1783, capitaine (1786), aide de camp du général Sheldon (1792). Gendre du ministre La Clavière. Adjudant général lieutenant-colonel, armée du Rhin (1792), maréchal de camp (septembre), chef d’Etat-major de Berruyer au camp sous Paris, attaché au ministre de la guerre Pache (octobre). Division du Haut-Rhin, commandant la place de Falck (août 1793). Destitué, se retira à Bienne en Suisse (septembre). En retraite (1795), obtint une pension (1796). Reprit du service au ministère de la guerre (novembre 1807). Chef de division (octobre 1812), à nouveau maréchal de camp et remis en activité (juin 1814). Chef de division au ministère de la Guerre (juin 1815).

[8] Notamment lorsque qu’il demanda son cartouche détruit dans un incendie, AD de l’Ain, 108 J 90.

[9] E.Desbrières, La Cavalerie pendant la Révolution, tome 1, p. 348.

[10] Qui n’est pas le Mabiez de Rouville qui commanda le bataillon. Il devint plus tard chef de bataillon du 8ème de l’Ain.

[11] Mabiez de Rouville indiqua le 17 avril 1793, « que le fils Nugoz vient d’être fait officier et Laverlochère lui a succédé », Jérôme Croyet, Pour la Nation… op cit.

[12] Il eut la faiblesse d’abandonner son corps mais rejoignit son bataillon avant le 17 avril 1793. Il fut cassé de son grade de caporal pour cette désertion.

[13] Il devint capitaine de la compagnie de grenadiers du 21ème de réserve et s’illustra particulièrement à la bataille de Neerwinden, le 18 mars 1793.

[14] Le 19 février 1793, ce volontaire fut évoqué par le lieutenant-colonel comme étant un des hommes manquants « d’effets ». Il eut la faiblesse de quitter son corps mais rejoignit finalement le bataillon comme l’indique Rouville en date du 17 avril, Jérôme Croyet, idem.

[15] Le 19 février 1793, Mabiez de Rouville, le signala comme étant un homme manquant « d’effets ».

[16] Le 19 février 1793, Mabiez de Rouville, le signala comme étant un homme manquant « d’effets ». Il eut la faiblesse de quitter son corps mais rejoignit finalement le bataillon comme l’indique Rouville en date du 17 avril 1793. Il fut cassé de son grade de caporal pour cette désertion, Jérôme Croyet, ibidem.

[17] Le 19 février 1793, Mabiez de Rouville, le signala comme étant un homme manquant « d’effets ».

[18] Idem.

[19] Ibidem.

[20] Ibidem.

[21] Le 19 février 1793, Mabiez de Rouville, le signala comme étant un homme manquant « d’effets ». Il fut tué le 18 mars 1793, à la bataille de Neerwinden.

[22] Le 19 février 1793, Mabiez de Rouville, le signala comme étant un homme manquant « d’effets ».

[23] Idem.

[24] Ibidem.

[25] Originaire de Genay, Mabiez indiqua d’abord qu’il avait été tué d’un coup de feu le 18 mars 1793, à la bataille de Neerwinden. Le 17 avril, il indiqua cependant qu’il avait peut-être été fait prisonnier par les Autrichiens.

[26] Le 19 février 1793, le Lieutenant-colonel Mabiez de Rouville indiqua que le fils Pété était dépourvu d’argent et fit dire à son père de lui envoyer des moyens. Il fut tué le 18 mars 1793, à la bataille de Neerwinden, Jérôme Croyet, Ibidem.

[27] Originaire de Massieux, il fut tué le 18 mars 1793, à la bataille de Neerwinden.

[28] Originaire de Trévoux, il déserta son corps et Mabiez de Rouville indiqua : « qu’il n’a pas reparu, il travaille dans une boutique de Paris, si je savais sa section je l’aurais bientôt fait rejoindre, si par hasard il allait à Trévoux, je vous prie de le faire rejoindre par des mains sûres ». Jérôme Croyet, Ibidem.

[29] Le 19 février 1793, ce volontaire fut évoqué par le lieutenant-colonel comme étant un des hommes manquants « d’effets », Jérôme Croyet, Ibidem.

[30] Il fut tué à la bataille de Neerwinden, le 18 mars 1793, comme le raconte le chef de bataillon Mabiez de Rouville dans ses lettres.

[31] AD de l’Ain, 2 L 31.

[32] Jérôme Croyet, Pour la Nation... op cit.

[33] E. Desbrières, La cavalerie… op cit, p. 360.

[34] Jérôme Croyet, article paru dans le fascicule le Bivouac dernier numéro de 2007 et 1er de 2008.

[35] Kairselicks, surnom donné par les Français aux soldats autrichiens.

[36] Jérôme Croyet, Pour la Nation… op cit.

[37] Jérôme Croyet, Pour la Nation… op cit.

[38] Jérôme Croyet, Pour la Nation… op cit.

[39] Idem.

[40] Bertaud et Roucaud, Registres matricules des demi-brigades de bataille, série 17 YC, archives de Vincennes, p. 196 et 197.

[41] Le 2 février 1794, il demanda et obtint un certificat de civisme devant le comité de surveillance de Bourg, AD de l’Ain 14 L 16.

[42] Originaire de Trévoux.

[43] Idem.

[44] AD de l’Ain, 2 L 139.