Corse

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Bataillons de la Corse :

La Corse reste un cas particulier dans les levées d’hommes, car elle restait la dernière conquête française, vieille d’à peine vingt ans au commencement de la Révolution. Les Corses par ailleurs avaient résisté et mené une guerre perdue d’avance contre la France (1768-1769). Ils avaient été les premiers à fonder un régime républicain, adoptant une constitution, un parlement (Corte), séparant les pouvoirs, prévoyant le vote des femmes (1755). La révolte des Corses alors administrés théoriquement par Gênes devait perdurer jusqu’à l’intervention française, qui acheta finalement l’île à la République de Gênes (1768). Depuis plus de dix ans, l’île s’était autoproclamée indépendante avec Pascal Paoli comme général de la Nation. Il avait volé de succès en succès, écrasa une révolte pro-française (1757), adoptant le drapeau à la tête de Maure, resté l’emblème de la Corse (1758), fondant une marine (1760-1761), repoussant une offensive des Génois (1763-1764), fonda l’Université de Corse (1765). L’île étant rachetée par la France, des troupes y débarquèrent, mais furent vaincues (1768). La France engagea alors d’importants moyens, l’escadre de Méditerranée déversa 25 000 hommes et le comte de Vaux. Cette force militaire organisée, en termina vite avec la résistance de Paoli et des patriotes corses (bataille de Ponte Novu, 9 mai 1769).

Une tentative de révolte éclata plus tard (1773), bientôt écrasée, et Paoli préféra prendre le large et s’installer à Londres. Ayant refusé une amnistie (1776), la Révolution lui permit de rentrer dans l’île, devenue un département français (1790). Mais la situation était ambiguë. D’un côté se trouvaient les partisans de la République française, la famille Bonaparte était de ceux là. De l’autre des partisans d’une Corse indépendante ou autonome avec le vieux héros corse, Pascal Paoli, sans compter bien sûr les partisans de la monarchie française. Cependant, les Corses se montrèrent patriotes, fournissant un nombre imposant de volontaires en 1791. L’esprit d’indépendance, les fondements des idéaux révolutionnaires étaient de fait ancrés depuis longtemps dans les esprits de beaucoup de Corses. Cette indépendance devait glisser progressivement pour un certain nombre d’entre-eux, vers la révolte contre-révolutionnaire armée. Cette situation était aggravée par la situation dans le Midi de la France, également en ébullition. La Convention nationale envoya plusieurs représentants en mission (1er février 1793), chargés d’ailleurs également des futurs recrutements. Le 5 février, la Convention nationale décréta la levée de 4 bataillons d’infanterie légère dans le département de la Corse. Ils devaient prendre suite dans la numérotation des autres bataillons de chasseurs. Le décret prévoyait la mise à disposition au ministre de la Guerre de 250 000 livres pour l’habillement de ces bataillons. La levée selon l’article V, devait se faire par la suppression des 4 bataillons de gardes nationaux volontaires levés dans le département en 1791 et incomplets. Toutefois le décret stipulait également que les commissaires chargés de cette formation pouvaient conserver en état les bataillons susceptibles d’être complétés et donc conservés. Il s’agissait des 1er, 2ème, 3ème et 4ème bataillons de la Corse. Cette mesure permettait en effet d’éliminer des personnages trop encombrants, de reprendre la main sur les forces armées corses qui pouvaient par ailleurs devenir un danger pour le pouvoir républicain du continent.

Le 2 avril, la Convention ordonnait l’arrestation de Paoli, qui se proclama bientôt Père de la Patrie, la révolte était consommée. Elle chassa bien vite les partisans corses de la France républicaine (Bonaparte), mais les insurgés, s’ils contrôlaient les campagnes, se trouvaient face à des forces républicaines retranchées dans les villes (Calvi, Saint-Florent et Bastia). Les événements révolutionnaires de Paris devaient aggraver la situation en provoquant la révolte fédéraliste et la chute des Girondins. La Corse put de fait profiter d’un embrasement général, à Lyon, dans le Midi avec Marseille, puis Toulon. Les principales bases françaises de départ pour envoyer des renforts en Corse se trouvaient donc paralysées et aux mains d’ennemis. Cette révolte avait été par ailleurs précédée par celle des royalistes en Vendée (mars), dès lors les Corses pouvaient espérer en finir avec la France. Sans flotte et sans armement lourd, Paoli fit alors le choix catastrophique (et qui lui fut compté jusqu’à nos jours) d’appel et d’allégeance à l’Angleterre. Ces derniers ne se firent pas prier pour débarquer des troupes et maintenir le blocus des ports, en quelques mois les villes corses tombaient entre leurs mains, Saint-Florent capitulait (février), suivit de Bastia (mai) et enfin de Calvi (août), dernier bastion de résistance des Français. Cette victoire entérina la proclamation par les Corses, d’un royaume anglo-corse (10 juin 1794), la couronne étant confiée au roi d’Angleterre, et l’île gérée par un vice-roi, en l’occurrence Paoli. Le masque étant tombé, le Père de la Patrie avait définitivement jeté le discrédit sur sa propre personne, faisant également du royaume anglo-corse, un enfant moribond. L’Angleterre lui préféra bientôt Pozzo di Borgo, autre chef emblématique corse, qui devait jouer un rôle considérable durant cette période et l’Empire (1764-1842, qui après avoir servi l’Angleterre, fut un diplomate de premier rang au service de la Russie, de 1814 à 1835). L’Angleterre n’avait en effet nullement l’intention de s’accommoder d’un personnage aussi remuant et peu sûr que Paoli, toujours fanatiquement lié à la Corse. Ce fut bientôt Sir Gilbert Elliot-Murray (1751-1814), diplomate écossais qui devint plus tard Gouverneur général des Indes (1807-1813) qui fut nommé à la place de vice-roi de Corse (1795). Le coup de grâce était ainsi donné au vieux patriote corse, l’agitation politique de ses derniers partisans fut bientôt muselée, lui-même se retira dans un petit village. Pour l’empêcher d’avoir un rôle dans les événements futurs, les Anglais lui ordonnèrent de plier bagage et de s’installer en Angleterre. Il mourut à Londres, le 5 février 1807, grandement déconsidéré. Son aventure avait de plus été effacée partiellement par celle d’un autre Corse : Napoléon Bonaparte.

Nommé général en chef de l’armée d’Italie (mars 1796), il devait mener sa fameuse campagne conduisant à l’occupation progressive de l’intégralité de la botte italienne, Piémont (1796), Lombardie et Vénétie (1797), États du Pape (1798), Naples (1799). La Corse se trouvait dès le départ affaiblie par les victoires françaises et Bonaparte ne devait bien sûr pas oublier l’occupation par les Anglais de son île natale. Les partisans de la France devait bientôt écraser facilement ceux de l’Angleterre en Corse, les chassant de l’île ainsi que les dernières troupes anglaises (printemps/été 1796). Quelques Corses devaient cependant continuer le combat dans les rangs de la Grande-Bretagne, notamment ceux commandés par un certain Hudson Lowe (1769-1844), dans le régiment Royal Corsican Rangers (1798-1817), engagé notamment en Égypte (1801), dans le royaume de Naples (1806-1808), et bientôt en Espagne (1808-1814). Si Pozzo di Borgo devait finalement avoir (presque) le dernier mot au Congrès de Vienne, la légende impériale et la fin sinistre de Napoléon devaient avoir raison définitivement du reste. La Corse resta française en 1815.

Pendant la période agitée comprise entre 1793 et 1796, la France avait promulgué la séparation de la Corse en deux départements (11 juillet 1793, départements du Golo et du Liamone), et de nombreuses levées, dont celle des 30 000 cavaliers (juin), et la levée en masse (août), n’eurent donc de fait aucune application dans l’île. La Corse était censée fournir 9 bataillons de réquisitionnaires destinés à l’Armée d’Italie. Un pour chaque district : à Bastia, Oletta, l’île Rousse, la Porta-d’Ampugnani, Corte, Cervione, Tallano, Ajaccio et Vico. De fait les Corses y répondirent partiellement en s’engageant dans les milices de Paoli contre la République française, pendant ce temps de nombreux Corses continuèrent de combattre pour elle. Les Corses semblent avoir fourni, eu égards à sa population d’environ 150 000 habitants (vers 1796), un nombre considérable de volontaires à la France, et cela en dépit des partisans nombreux de Paoli et Pozzo di Borgo.

Levée de 1791 :

1er bataillon de Corse, formé le 21 juillet 1791, ou le 6 janvier 1792,

2e bataillon de Corse, formé le 21 juillet, ou le 1er avril 1792,

3e bataillon de Corse, formé le 9 décembre 1791, ou le 7 mars 1792

4e bataillon de Corse, formé le 12 août 1791, ou vers février 1792,

Levée de 1800-1802 :

1er bataillon de chasseurs corses, formé en janvier 1800,

2e bataillon de chasseurs corses, formé en janvier 1800,

3e bataillon de chasseurs corses, formé en janvier 1800,

4e bataillon de chasseurs corses, formé en janvier 1800,

5e bataillon de chasseurs corses, formé en janvier 1800,

6e bataillon de chasseurs corses, formé en janvier 1800,

Bataillon des tirailleurs corses, formé le 8 juillet 1802.

Autres unités :

1ère compagnie franche corse, formée au printemps 1793,

2e compagnie franche corse, formée au printemps 1793,

3e compagnie franche corse, formée au printemps 1793,

Compagnie franche de Susini, formée au mois de mars ou d’avril 1793,

Compagnie franche de Bonnelli, formée au mois de mars ou d’avril 1793,

Compagnie franche de Massoni, formée entre mai et août 1793,

Compagnie franche de Guibréja, formée entre mai et août 1793,

Compagnie franche de Léoni, formée entre mai et août 1793,

Compagnie franche de Subrini, formée entre mai et août 1793,

Compagnie franche de Coti, formée à la fin de l’année 1793,

Compagnies franches du Golo ou Solo, formée le 4 janvier 1797,

Compagnie franche du Liamone, formée par arrêté le 13 avril 1803,

1ère compagnie d’infanterie légère corse, formée dans l’hiver 1796-1797,

2ème compagnie d’infanterie légère corse, formée dans l’hiver 1796-1797,

3ème compagnie d’infanterie légère corse, formée dans l’hiver 1796-1797,

4ème compagnie d’infanterie légère corse, formée dans l’hiver 1796-1797,

5ème compagnie d’infanterie légère corse, formée dans l’hiver 1796-1797,

6ème compagnie d’infanterie légère corse, formée dans l’hiver 1796-1797,

7ème compagnie d’infanterie légère corse, formée dans l’hiver 1796-1797,

8ème compagnie d’infanterie légère corse, formée dans l’hiver 1796-1797.

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Article de Laurent Brayard