3e bataillon de la Drôme

3ème bataillon de la Drôme (Valence et de Die) :

Date de formation : il fut formé le 12 octobre 1791 selon Belhomme1, le 19 octobre 1791 selon d’autres sources.

Formation :

Il fut formé de 571 volontaires des districts de Valence et de Die, qui furent rassemblés à Valence, le 12 octobre 1791. Il fut formé en compagnies du 13 au 16 octobre, puis organsé en bataillon du 16 au 18 octobre. Il fut passé en revue par le maréchal de camp de Folnay, de la 7ème division militaire, assisté du commissaire des guerres Simon-Antoine-François-Marie de Sucy de Clisson, et de Messieurs Grangier, Long, Pascal et Pinet, commissaires du département2.

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Historique :

1791 :

Il fut complètement armé, mais manquait d’une bonne moitié de l’habillement et des effets nécessaires. A la fin du mois d’octobre, le bataillon se mit toutefois en route, après avoir parcouru 30 lieues, il s’installa dans le petit bourg de Buis-les-Baronnies. Il fut mal accueilli par les populations, en partie royalistes et manquait toujours d’effets d’habillements et d’équipements3. Il fut passé en revue par la maréchal de camp La Ferrière, toujours en manque d’effets, fin novembre.

1792 :

Le 1er janvier, il était en garnison à Montélimar4. Mais Dumont indique qu’à cette date, il se trouvait toujours à Buis, avec une compagnie à La Rochette5. Deux compagnies furent envoyées à Mollans et trois autres à Saint-Paul-les-Trois-Châteaux, selon les ordres du maréchal de camp de Muy (15 mars). Il se trouvait au camp de Lyon dans les rangs de l’armée du Midi (mai)6. Il fut ensuite envoyé en garnison à Avignon (25 avril), où il se trouvait encore au mois de juin. Il se trouvait à Grasse (juillet), ensuite envoyé à l’armée des Alpes et arriva le 29 septembre à Chambéry. Il cantonna par la suite à Bourg-Saint-Maurice, se plaignant de nombreuses désertions dans ses rangs ou de démissions (17 novembre). Il cantonna ensuite à Montmélian (15 décembre)7.

1793 :

En janvier, le bataillon se trouvait à l’Armée du Var, notamment à Saint-Pierre-d’Albigny (11 janvier), où il fut passé en revue n’alignant que 477 hommes (12 mars)8. Il campa dans la vallée de la Tarentaise (avril-mai), de nouveau passé en revue à Saint-Pierre-d’Albigny (15 mai), ayant des pionniers à Bourg-Saint-Maurice. Il fut envoyé au siège de Lyon (15 août). Il participa aux opérations du siège jusqu’à la capitulation de la ville (9 octobre). Il était présent dans les brigades détachées de l’armée des Alpes (21 décembre). Il comprenait un effectif de 439 hommes et 203 aux hôpitaux9. Michel Garcin indique qu’il fut envoyé à l’Armée des Pyrénées-Orientales10, puis il tînt garnison à Rodez (23 décembre).

1794 :

Il demeura dans l’Aveyron jusqu’en mars. Le bataillon servait à l’Armée des Pyrénées-Orientales dans la division de gauche du général Sauret, à Ortaffa (19 avril)11. Il prit part au combat de Palau-del-Vidre (17 avril), à la bataille du Boulou (30 avril au 1er mai), à l’attaque et reprise de Collioure (3 au 26 mai), puis fut envoyé sur la Junquera, campant à Cantallops (19 juin). Il se trouvait au camp de Darnius (1er septembre), puis au camp de Cancères (22 septembre), où il envoya au Comité de Salut Public les notes de ses officiers. Il y resta jusqu’au mois de novembre, ayant un effectif pléthorique de 189 hommes, dans la brigade Motte avec le 1er bataillon du 35ème régiment d’infanterie, 5ème et 6ème de la Gironde, 7ème de la Haute-Garonne, 5ème de la Haute-Vienne12. Il combattit sur les lignes de Figuera (17-20 novembre), assista à la capitulation de la place forte de Roses ou Rosas, et fut complété par la suite par 500 réquisitionnaires.

1795 :

Il fut envoyé à Castello de Ampurias, où il prit ses quartiers d’hiver, y restant jusqu’au 18 février.

Embrigadement/amalgame :

1ère formation :

La 69ème demi-brigade de bataille fut formée le 21 mars 1795, à Castillon, selon Belhomme13, le 7 avril 1794 selon Susane14, le 19 juin selon le commandant Dumont15. Elle se composait du 1er bataillon du 35ème régiment d’infanterie, du 1er des Hautes-Alpes et du 3ème de la Drôme.

2ème formation :

La 69ème de bataille devint à l’armée d’Italie, la 18ème demi-brigade de ligne, à Albenga, le 18 mars 1796.

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État des cadres du 3e bataillon de la Drôme à sa formation16

État-major :

Lieutenant-colonel Louis-Jean-Baptiste Gouvion, de Toul dans la Meurthe-et-Moselle, 39 ans.

Lieutenant-colonel en second Claude-Henri Belgrand de Vaubois, de Claivaux dans l’Aube, 43 ans.

Quartier-maître trésorier Étienne-Jacques Blachette, de Valence, 25 ans,

Adjudant-major François Argod, de Valence, 32 ans.

Adjudant sous-officier Jean-Baptiste Davin, de Baratier dans les Hautes-Alpes, 42 ans,

Chirurgien-major Melleret d’Étoile.

Compagnie de grenadiers : capitaine Alexandre-Laurent Garnier de Laborie de Beaumont, 24 ans, lieutenant Louis-Antoine Vinay-Crozat de Saint-Jean-en-Royans, 22 ans, sous-lieutenant Julien-Martin Melleret, d’Étoile, 19 ans.

1ère compagnie de Châtillon et Lus-la-Croix-Haute : capitaine Jean-Étienne Rolland de Châtillon, 22 ans, lieutenant Pierre Morand, de Pontaix, 23 ans, sous-lieutenant Jean Felix, de Châtillon, 20 ans.

2ème compagnie de Chabeuil : capitaine Louis-Reymond Sarra de Chabeuil, 34 ans, lieutenant Charles-Victor Prompsal, de Château-Double, 22 ans, sous-lieutenant Bruno Urtin, de Chabeuil, 20 ans.

3ème compagnie de Bourg-les-Valence et Tain, capitaine Claude-Antoine Béranger de Valence, 27 ans, lieutenant Pierre-Laurent Beguin, de Tain, 34 ans, sous-lieutenant Jacques Trouillet, de Châteauneuf-d’Isère, 21 ans.

4ème compagnie de Montélier : capitaine Joseph Bonnardel, de Charpey, 28 ans, lieutenant Victor Drevet, sous-lieutenant Claude Bellon, de Valence, 23 ans.

5ème compagnie de Valence : capitaine Jean-Urbain Fugière de Valence, 39 ans, lieutenant Pierre-Benoit Béranger, de Valence, 31 ans, sous-lieutenant Simon Boissonnat.

6ème compagnie de Loriol : capitaine François Deaux. Lieutenant Jean Mazade, de Loriol, 33 ans, sous-lieutenant Simon Boissonnat.

7ème compagnie de Saint-Jean-en-Royans : capitaine Louis-Joseph-Étienne Ezingeard de Saint-Jean, 25 ans, François-Gabriel Marchand, de Saint-Jean, sous-lieutenant Pierre-Charles-Antoine Vinay, de Saint-Jean, 20 ans.

8ème compagnie d’Étoile : capitaine Antoine-Philippe Nery-Durozet de Montmeyran, 26 ans, lieutenant Jacques-Antoine Melleret, d’Étoile, 31 ans, sous-lieutenant Pierre-Simon Valayer, de Beaumont, 19 ans.

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État des cadres au moment de l’amalgame17

État-major : chef de brigade Jean-Urbain Fugière (capitaine en 1791), quartier-maître trésorier Jean-Louis Garnier, adjudant-major Jean-Baptiste Chabert, chirurgien P. Pastour, adjudant sous-officier vacant.

Compagnie de grenadiers : capitaine Julien-Martin Melleret (sous-lieutenant en 1791), lieutenant F. Pettin, sous-lieutenant J. Frère.

1ère compagnie : capitaine Jean-Étienne Rolland (déjà à ce poste en 1791), lieutenant Pierre Morand (déjà à ce poste en 1791), sous-lieutenant Jean Félix (déjà à ce poste en 1791).

2e compagnie : capitaine J. Quiot, lieutenant A. B. Bose, sous-lieutenant H. Morin.

3e compagnie : capitaine Claude-Antoine Berenger (déjà à ce poste en 1791), lieutenant Pierre-Laurent Beguin (déjà à ce poste en 1791), sous-lieutenant Jacques Trouillet (déjà à ce poste en 1791).

4e compagnie : capitaine P. Blanc, lieutenant V. Trouillet, sous-lieutenant J. Bonnardel (il y a un Jacques Bonnardel capitaine en 1791, serait le même qui aurait été rétrogradé).

5e compagnie : capitaine P. Chabrier, lieutenant A. Reboul, sous-lieutenant L. J. B. Barbaud.

6e compagnie : capitaine Jean Mazade (lieutenant en 1791), lieutenant H. Terrot, sous-lieutenant P. Chabrier.

7e compagnie : capitaine Louis-Joseph-Étienne Ezingeard (déjà à ce poste en 1791), lieutenant P. S. Valayer, sous-lieutenant P. Rauchon.

8e compagnie : capitaine Antoine-Philippe Durozet (déjà à ce poste en 1791), lieutenance vacante, sous-lieutenant V. Terron.

Compagnie de canonniers : capitaine R. Rolland.

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Portraits :

François Argod, né le 15 mai 1759, à Valence dans la Drome, maître d’écriture, il s’enrôla dans le régiment d’artillerie de Toul (novembre 1777), dont il fut congédié l’année suivante (octobre 1778), pour défaut de taille. Ceci ne l’empêcha pas de s’enrôler à nouveau dans le 19e régiment de cavalerie (royal-champagne, 3 mars 1780), brigadier (1783), maréchal des logis (1785), adjudant (1786), renvoyé pour avoir pris part à une révolte contre les officiers (21 août 1790). La Constituante le réintégra (11 décembre), mais il s’enrôla dans le 3e bataillon de volontaires de la Drôme (11 octobre 1791), élu adjudant-major, capitaine de grenadiers (21 février 1792), lieutenant-colonel du 5e bataillon des Bouches-du-Rhône (4 août), il servit à l’armée d’Italie, puis au siège de Toulon (1793). Chef de brigade (17 décembre), envoyé à l’armée des Pyrénées-Orientales (janvier 1794), il s’illustra à la bataille du Boulou (30 avril et 1er mai), puis au siège du fort Saint-Elme (mai) et à la prise de Roses (février 1795). Il passa à l’armée d’Italie (fin 1795), servant à la division Sérurier puis Joubert, il combattit à la bataille de Rivoli (14 janvier 1797), chef d’état-major de la division Victor, il s’illustra à la bataille de la Favorite (16 janvier), envoyé ensuite à l’armée d’Angleterre (12 janvier 1798). Il servit un moment à l’armée du Rhin, puis d’Italie, retournant à la division Victor (mai). Il s’illustra à la bataille de Vérone (26 mars 1799), nommé sur le champ de bataille général de brigade, il fut bientôt tué à la bataille de Cassano, le 27 avril 1799.

Caillet, lieutenant dans la gendarmerie à pied, il fut nommé à son grade au 3e bataillon de la Drôme, servant alors dans l’armée des Pyrénées-Orientales18.

Jean Davin, né à Baratier dans les Hautes-Alpes le 15 février 1749. Canonnier au 4e régiment d’artillerie ci-devant de Grenoble (1766), sergent (1775), sergent-major (1789), adjudant sous-officier au 3ème bataillon des volontaires de la Drôme (17 novembre 1791), adjudant-major (mars 1792), lieutenant au 4ème régiment d’artillerie à pied (1er juin), lieutenant en 1er (20 décembre), il servit en Savoie (1792 et 1793). Élu lieutenant-colonel du 3ème bataillon des volontaires de la Drôme (24 juin 1793), il servit au siège de Lyon (septembre et octobre). Il poursuivit la colonne royaliste qui tenta une sortie à la fin du siège et l’atteignit, dispersant ou faisant prisonniers des insurgés. Général de brigade (23 décembre), il fut envoyé à l’armée des Pyrénées-Orientales et servit dans la division Augereau (1794 et 1795), servant à la bataille de Saint-Laurent de la Mouga (13 août 1794), commandant à Bellegarde (octobre), il servit à la bataille de la Montagne Noire (17 novembre) puis devant Figuières (20 novembre). Il passa à l’armée d’Italie et servit à la division Serurier (24 octobre 1795). Commandant la 1ère brigade de la division Garnier (janvier 1796), commandant à Tortone (avril), commandant le château de Milan (29 juin), puis servit à la division Despinoy (25 juillet), commandant à Porto Legnago (septembre). Il servit au blocus de Mantoue (10 octobre) et commanda par intérim la division Dumas sous Sérurier (21 décembre 1795). Il servit dans la division Sérurier (février 1797), mais cessa ses fonctions (juin). Employé à l’armée des Grandes Alpes par ordre du général Championnet (juillet 1799), puis dans la 7ème division militaire (fin 1799). Il servit à la division Valette (mars 1800), chassé du Mont-Cenis (8 avril), commandant la place de Fenestrelles (29 décembre). Il se retira dans ses foyers pour cause de santé (juin 1801), admis à la retraite (septembre), il commanda encore à Modène (octobre), puis reçut la Légion d’honneur (14 juin 1804). Commandant la flottille du lac de Garde pendant la campagne de 1805, commandant d’armes à Palma Nova (1806), à nouveau en retraite (mai 1808), il fut fait chevalier de Saint-Louis, à la Première Restauration (21 novembre 1814) et mourut à Paris le 17 décembre 1819.

Jean-Urbain Fugière, originaire de Valence où il naquit le 8 février 1752. Soldat au régiment de Barrois (1770), caporal (1773), sergent (1775), sergent-major (1781), congédié (1784). Élu capitaine (12 octobre 1791), au 3ème bataillon de la Drôme, il commanda la 5ème compagnie. Il fut nommé chef de bataillon du 3ème de la Drôme (4 août 1793). Il servit à l’Armée des Alpes et au siège de Lyon, il dissipa l’insurrection à Montbrison et à Villefranche. A l’Armée des Pyrénées-Orientales sous les ordres de Dugommier, puis de Sorel, il repoussa (20 novembre) une forte colonne ennemie qui tentait de prendre de flanc la division. Il passa avec ce grade à la 69ème demi-brigade de bataille. A la mort de Riondet, il prit sa place avec le grade de chef de brigade (18ème demi-brigade de ligne)19. Nommé général de brigade (20 avril 1798). Il eut un bras emporté à la bataille d’Aboukir (25 juillet 1799). Il écrira de sa main : « J’ai fait sous le grand Bonaparte, les campagnes à l’Armée d’Italie »20.

Louis-Jean-Baptiste Gouvion, fils d’un capitaine d’infanterie, élève à l’École Royale d’artillerie, puis lieutenant en premier au régiment d’artillerie de Grenoble, capitaine des sapeurs. Nommé général de brigade (20 juin 1793), à l’Armée des Alpes, il s’empara du Mont-Cenis puis du Petit Saint-Bernard (1794). Servitt ensuite à l’Armée du Nord, en Hollande sous Brune, et pendant l’Empire en Prusse et en Pologne. Sénateur, Pair de France, il mourut à Paris le 22 novembre 1823.

Claude-Henri Belgrand de Vaubois, comte de Belgrand, originaire de Clairvaux dans l’Aube, artilleur sous l’Ancien Régime, ayant obtenu le grade de capitaine-commandant au 4ème régiment d’artillerie à pied, il fut nommé général de brigade à l’Armée des Alpes, puis divisionnaire à l’Armée d’Italie. Désigné pour l’expédition d’Égypte, il participa à la prise de Malte, dont il fut nommé gouverneur. Bloqué, il fut assiégé par les Anglais et dut se rendre. Il fut admis à la retraite (novembre 1801). Comte de l’Empire et Pair de France, il mourut à Beauvais, le 5 novembre 1839, à 91 ans.

Victor Perrin, futur maréchal de France, et duc de Bellune, s’engagea cinq mois après son mariage dans le 3e bataillon de la Drôme : « O sublime élan de 91, que ne puis-je te célébrer dignement, O spectacle le plus magnifique que jamais aucune nation ait offert au monde ! O jours de patriotisme et de gloire, échauffez et nous et nos générations de vos feux immortels »21.

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Documents :

« Bataillon numéro 3du 13 octobre 1791, le canton de Valence conjointement avec deux hommes pris dans celui du bourg les Valence formant une compagnie de 63 hommes, s’est retiré dans la sacristie de l’Église de Saint-Ruf, il a été annoncé que l’on allait procéder à l’érection du capitaine de la ditte compagnie, l’appel nominal a été fait, chaque volontaire présent a mis son bulletin dans un chapeau. Il est résulté du dépouillement que Urbain Figuière a été proclamé capitaine de la compagnie22 ».

« Au Buis, le 1er novembre 1791, j’ai l’honneur de vous informer que le 3ème bataillon du département de la Drôme est arrivé ici le 31 octobre. Vous nous avez destiné une garnison où il ne manque que du bled, du bois et des logements. Si pour parer à ces inconvénients on nous fait fournir beaucoup de détachements, il en résulte un autre qui est d’envoyer des soldats qui n’ont encore ny discipline, ny instruction. La bonne volonté seule ne suffit pas, il faut y joindre un peu d’expérience. Vous concluerez sûrement d’après cet exposé qu’une autre destination nous serait infiniment avantageuse. Je la crois d’autant plus instante que nous sommes menacés de manquer de pain, sous quelques tems, ou au moins de mécontenter beaucoup d’habitants du lieux par l’augmentation que nous occasionnons à cette denrée, ce qui se manifeste déjà par des murmures. Nombre d’habitants de ce misérable pays sont dans l’impossibilité de fournir le bois pour la cuisson, de la soupe à nos volontaires, non plus que les lits nécessaires pour les coucher, ce qui a fait prendre le parti à la municipalité d’en placer trois compagnies dans un couvent. Il leur fallait du bois, et sur son refus nous l’avons requis de faire les avances de cette fourniture pour être payé par qui de droit, ce à quoi, elle a accédé. Nous vous observons que notre habillement est extrêmement urgent, un grand nombre de nos volontaires étant presque nuds. J’ai prié Monsieur de Ferrières de vous faire la demande de cartouche d’infanterie ; je vous prierais de nous les faire passer sans perdre un seul moment, les volontaires manifestant plus que la répugnance de marcher sans en être munis. Je vous demanderais aussi des pierres à fusil. D’après les réquisitions de Monsieur le Commissaire du Roi du district de Nions, je fais partir demain un Lieutenant et 30 hommes pour Lachaux, la municipalité du Buis pour fournir des munitions a eu de la peine à me faire avoir 150 cartouches, et autant de pierre qu’il fallait23 ».

« Au Buis, ce 3 novembre 1791, Je vous préviens, Messieurs, que beaucoup de volontaires ont un besoin urgent de souliers, je prens le parti de leur en faire faire à Buis, lesquels seront payés sur la retenue des trois sols faite aux volontaires pour le payement de leur habillement ; comme j’ignore, messieurs, si cette opération est bien conforme à la loi, et que cependant vous sentez qu’il est impossible que nos gens aillent pieds nuds, je vous prierai de vouloir bien m’y autoriser, en me mandant ce que vous en pensez pour pouvoir arrêter l’opération si vous imaginez que je ne dusse la continuer. Je vous préviens que quelques-uns des volontaires sont parti de Valence ayant la vérole, la route et vraisemblablement la débauche ont tellement empiré ce maudit mal qu’il leur est maintenant impossible de faire un pas, il vient de s’offrir un médecin et un chirurgien qui proposent de les traiter au même prix que dans les hôpitaux du Roi, c’est-à-dire que conformément aux décrets, je leur payerais 6 sols par jour, pour chaque volontaire qu’ils traiteront, et que le gouvernement payera le reste conformément aux ordonnances des hôpitaux, si ce soir je puis terminer cet arrangement, je le préférerai à envoyer des hommes à Grenoble, qui pour y aller seraient obligés de repasser par Valence, et auxquels il faudrait toute nécessité que l’État fourni des montures et voitures, ce qui coutterait considérablement. Je vous prie de voulloir bien encore m’autoriser à cette seconde opération. Si cependant mes Esculapes me manquent de parole, je serai obligé d’envoyer mes malades à Grenoble, en leur donnant comme aux troupes de ligne, 3 sols par lieue, et leur faisant fournir des voitures aux comptes de l’état, mais dans ce cas il faudra que vous ayez la bonté de m’expliquer comment se payeront ces trois sols parce que vous savez que lorsqu’un volontaire est à l’hôpital, l’excédent de sa paye au –delà de 6 sols pour payer la journée d’hôpital est retenu pour solder son habillement. Je vous préviens que nos volontaires ont été fêtés et reçus dans plusieurs villages avec beaucoup de vin, et le moyen de les empêcher de boire ? Il s’en est suivi des farandoles, des peaux de caisse crevées, nous avons eu une voiture qui a renversé, il y avait dessus plusieurs fusils appartenant à des hommes incommodés, ces fusils ont été abîmés, tout cela demandera beaucoup de réparations et je ne puis les faire exécuter qu’au compte du département. Les habitants de ce pays sauvage commencent un peu à se dégeler ; les boulangers avaient augmenté le pain de 2 liards la veille de notre arrivée ; on dit qu’ils avaient fait un accord entre eux de faire payer 100 pistoles d’amande à celui qui le donnerait au-dessous du prix convenu, un seul ne voulut point souscrire à cette convention, il nous livre le pain au même prix qu’il était auparavant, mais il ne peut en fournir à tout le monde. Plaintes à la municipalité de la différence du prix, elle nous donna pour raison qu’il y avait quatre sortes de pain, que l’accès de Buis était très difficile, que les fermiers qui l’apportaient y mettaient eux-mêmes le prix, que l’on craignait que nous n’occasionnions une disette, etc… Je pense que d’après les essais que nous allons faire le pain reviendra à son premier prix, c’est-à-dire à 3 sols la livre poids de table. Comme je crois, que dans un pays perdu et abandonné du ciel, un chef, peut prendre quelques petites choses sur lui, toutes les fois que je le ferai je vous en rendrai compte. Gouvion.

PS : je vous remercie de voulloir bien ne pas oublier notre drapeau. Le corps serait bien aise de le faire bénir par le curé constitutionnel qui a été installé sans aucun tumulte, nous allons à la messe, qui en vaut bien une autre, mais presque point d’habitants n’y vont, on leur a persuadé qu’ils seraient excommuniés s’ils y allaient, aussi nous regardent-ils comme tels, et ils prétendent que déjà nous commençons à jaunir »24.

« Copie de l’extrait du registre des greffes de police de la ville du Buis du 3 décembre 1791. Le sieur Granon, procureur de la commune a exposé que depuis longtemps les habitants de cette ville se plaignent de quelques volontaires du 3ème bataillon que ceux-cy se plaignent également des habitants que de cette aigreur réciproque il peut en résulter des troubles alarmants, que dans la nuit dernière, il y a eu une rixe entre lesdits volontaires et les habitants qui aurait eu des suites funestes sans l’intervention de deux officiers municipaux, de Monsieur de Vaubois lieutenant-colonel et de plusieurs autres officiers du bataillon, et comme il est important de remonter à la source et de constater les faits, il requiert acte de son exposition qu’il soit informé sommairement tant à charge qu’à décharge, circonstances et dépendances pour établir ladite information »25.

« Messieurs, il n’est point de jour qui n’ajoute à notre très pénible situation, il nous devient impossible d’en supporter plus longtemps le poids, ce n’est point, vous vous l’imaginez bien, le courage qui nous manque ; toujours nous avons le même désir de combattre les tirans des peuples et ce sentiment existera dans nos cœurs tant qu’il existera des ennemis contre la Constitution pour le soutien de laquelle nous nous sommes armés. Mais si, d’aimer la Patrie est la première des vertus, subsister est le premier des besoins et ce sont les moyens de satisfaire à ces besoins qui deviennent chaque jour pour nous d’une difficulté dont rien n’approche. Enfin, Messieurs, nous sommes à la veille de manquer de pain. Oui, Messieurs, nous sommes à la veille de manquer de pain. C’est la vérité pure, toute effroyable qu’elle est. Et nous en eussions manqué plutôt sans Monsieur Vaubois qui, par une généreuse entreprise autant que paternelle, a jusqu’à ce moment fait cuire du pain qu’il distribuait deux fois la semaine aux volontaires par portion égale, mais cette entreprise, qui lui a coûté des peines et des frais immenses qu’il ne compte pour rien, il en peut plus la continuer parce qu’il ne paraît plus de bleds aux marchés et que dans les environs on ne veut pas livrer pour des assignats tant ils sont discrédités dans ce pays.

Vous frémirez encore si vous voyez comment sont couchés un grand nombre de volontaires ! Vous ne pourrez aussi défendre d’un sentiment d’indignation lorsque que vous saurez que les aubergistes ont ôté leur enseigne pour n’être pas contraint à alimenter de braves volontaires qui ne peuvent payer qu’en assignats. Vous concevez qu’une pareille horreur peut avoir des suites funestes, nous sommes pleins d’un respect inaltérable pour la loi ; mais la loi veut que nous vivions. Ainsi, donc au nom de la patrie que vous aimez, au nom de l’attachement que vous devez avoir pour ses défenseurs, ôtez-nous promptement d’ici, envoyez-nous à Arles, à Avignon, peu nous importe : agissez, disposez, ordonnez, tout nous est égal, pourvu que vous nous sortiez du cloaque où nous sommes. Assez longtemps nous avons payé le tribut au mal être. Un bataillon nous vous l’avons observé avec vérité n’est pas moins nécessaire dans cette ville que nous avons régénérée. Et si le maintien de la paix que nous y avons établie exige encore la présence de 3 compagnies de soldats nationaux, il vous reste à disposer de trois bataillons de votre département, et il est juste que chacun d’eux remplisse à son tour la tâche que nous remplissons depuis 6 mois. Nous espérons tout de votre bienveillance, que nous nous efforcerons toujours de mériter. Les officiers, sous-officiers et volontaires du 3ème bataillon de la Drôme26 ».

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Alors qu’il se trouvait en garnison avec le 2ème de la Drôme à Avignon, les hommes écrivirent à l’Assemblée Nationale :

« Législateurs vous avez désirés que des soldats protégeassent l’organisation du ci-devant Comtat, vos vœux et notre mission vont être remplis, nous osons croire que notre conduite répond à votre confiance, nous vous en demandons la récompense, envoyez-nous au combat. Fait à Avignon, le 26 juin l’an quatrième de la Liberté. Gouvion lieutenant-colonel commandant, Vaubois lieutenant-colonel, Argod capitaine, Nugues capitaine, Julien caporal27 ».

« Lettre du 3 juillet 1792, Je ne cesserais de vous demander des chemises et des bas, beaucoup de volontaires en manquent… Nous vous prions de prendre les mesures pour que la fourniture soit bonne, nous sommes fort mécontents de celles qu’on nous a envoyé. Les culottes manquent de fond de manière qu’en faisant l’exercice elles se fendent, presque tous les habits mal cousus ont besoin de grosses réparations surtout en doublures… Nous n’avons point été armés à neuf, comme on s’est plus à vous le dire, nous avons seulement été autorisé par le général Wittgenstein à échanger nos plus mauvais fusils contre d’autres qui vallaient un peu mieux et qui avaient été déposés dans la salle d’armes d’Avignon par les régiments de Soissons et de Boulonnois qui ont été armés à neuf ; ces armes leur avaient servis pendant une vingtaine d’années, ainsi vous voyez que nous n’avons fait qu’un échange de fusils cassés ou très mauvais contre d’autres dont on peut encore tirer quelque service, Gouvion. Au moment de cacheter la lettre, il m’arrive trois recrues, deux de Tain, et un Valence28».

« Lettre du 17 juillet 1792, Messieurs, la plus grande difficulté n’est pas d’avoir des hommes pour compléter notre bataillon, mais bien d’avoir des habillements, des chemises et des bas. Tous les jours je suis tourmenté par les justes demandes des volontaires qui arrivent pour ainsi dire nuds comme la main. L’on m’a assuré qu’il existe à Valence un magasin considérable de chemises, je députe vers vous Monsieur Chabert pour vous engager à nous en faire passer 600, d’après les ordres de Monsieur De Montesquiou notre bataillon ne devant pas tarder d’entrer en campagne, je vous prie, Messieurs de mettre le plus de célérité possible dans l’envoi de cette demande29».

« A Avignon, le 1er aoust 1792, l’an IV de la Liberté, Messieurs, nous avons fait un marché avec un négociant de Lodève pour nous fournir 400 aulnes de drap pour des vestes et culottes ainsi que pour des doublures à lavenant ; le prix des draps bleus est si excessif que nous n’avons encore conclu aucun marché. J’ai écrit depuis un mois au ministre pour avoir 226 gibernes et 26 sabres pour mes grenadiers ; il ne me fait point de réponse à qui donc faut-il s’adresser ? Si c’est à vous je vous prie de me les faire parvenir sans retard. Le commandant en chef de l’armée du Var nous manque que nous ne devons compter sur aucun magasin pour l’équipement attendu qu’ils sont entièrement vides le Sieur Cotte négociant à Valence, nous a promis des chemises, il nous en faut encore 500 à quelques prix que ce soit, je vous prie messieurs de vouloir bien lui donner ordre les faire passer sans retard30 »

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Article de Laurent Brayard

1 Belhomme, Histoire de l’Infanterie en France, tomes 3 à 4.

2 Michel Garcin, p. 56.

3 Michel Garcin, p. 60.

4 Journal militaire de 1792.

5 Commandant Dumont, Les bataillons de volontaires de 1791, p. 93.

6 Journal militaire de 1792, p. 432.

7 Michel Garcin, déjà cité, p. 125.

8 Michel Garcin, déjà cité, p. 152.

9 SHAT, Armée des Alpes.

10 Michel Garcin, déjà cité, p. 181.

11 Chuquet, Dugommier.

12 Chuquet, Dugommier.

13 Belhomme, Histoire de l’infanterie en France.

14 Louis Susane, Histoire de l’ancienne infanterie française.

15 Commandant Dumont, Les bataillons de volontaires de 1791, p. 93.

16 Commandant Dumont, Les bataillons de volontaires de 1791, p. 92.

17 Commandant Dumont, Les bataillons de volontaires de 1791, p. 93.

18 Loi portant à la nomination à 131 emplois vacants dans l’armée, à la disposition de la Convention nationale, du 27 pluviôse an III.

19 Jules Vassias, Histoire du 69ème régiment d’infanterie, p. 48.

20 Jules Vassias, Historique du 69ème régiment d’infanterie, p. 353.

21 Chuquet, La première invasion prussienne, p. 72.

22 AD, Valence, dossier L 342.

23 AD de Valence, dossier L 342.

24 AD de Valence, dossier L 342.

25 AD de Valence, dossier L 342.

26 AD de Valence, dossier L 342.

27 Cité par Michel Garcin, Archives Nationales, Paris, dossier D XV/67.

28 AD de Valence, dossier L 380.

29 AD de Valence, dossier L 380.

30 AD de Valence.