2ème bataillon de la Drôme (Romans et de Die) :
Date de formation : Il fut formé le 12 octobre selon Belhomme1, le 20 octobre 1791 selon d’autres sources.
Formation :
Passé en revue entre le 13 et 20 octobre 1791 par le maréchal de camp de Folnay, de la 7ème division militaire, assisté du commissaire des guerres Simon-Antoine-François-Marie de Sucy de Clisson et plusieurs commissaires du département, il se trouvait fort de 571 hommes2.
Historique :
1791 :
Le bataillon est dirigé sur Montélimar, ayant un équipement déficient puis il est envoyé à Cavaillon où il a la charge de rétablir l’ordre, la ville étant en proie à des désordres continuels3.
1792 :
Le 1er janvier, il était en garnison à Cavaillon4 et Avignon. Il se trouvait au mois de mai au camp de Lyon dans les rangs de l’armée du Midi5. Il fut envoyé à l’armée des Alpes, cantonna à Bourgoin le 19 septembre, le 20 à la Côte-Saint-André, le 22 à Grenoble. Le 27 septembre, il campa à un quart de lieue de Fort-Barraux, proche du 3ème bataillon de la Drôme qui venait d’arriver.
De Fort-Barraux, le 2ème bataillon se mit en marche vers le 1er octobre et rejoint le camp de Chambéry :
« Le 5 octobre, Claude Nugues était détaché à Moutiers avec sa compagnie de grenadiers, 100 hommes du 2ème bataillon et 100 du 3ème bataillon. Le 6, à la suite d’une alerte de nuit, il fut lancé en avant avec ses grenadiers et une compagnie de Chasseurs, pour aller reconnaître et repousser l’ennemi. Celui-ci avait disparu, ou plutôt n’avait pas paru du tout, l’alerte avait été occasionnée par des paysans qui poursuivaient des ours ou des chamois dans la montagne. Le 7 on se porta en avant, et le 8 on arriva à Saint-Maurice, le dernier bourg de Savoie, au pied du Petit Saint-Bernard. Il n’y eut pas d’engagement avec les piémontais, mais on recueillit quantité de bagages, de voitures, d’effets de prix, qu’ils avaient été forcés d’abandonner dans leur retraite précipitée6».
Par la suite Claude Nugues nous apprend que :
« Le 2ème bataillon de la Drôme fut établi au camp d’Aunay, près de Carouge, sur la rive gauche du Rhône, d’autres forces étaient rassemblées sur la rive droite du côté de Gex, et on construisit rapidement un pont de bateaux pour servir de communications entre les deux détachements dont l’ensemble s’élevait à environ 6 000 hommes7».
La campagne de Savoie étant terminée, le bataillon quitte l’Armée des Alpes, traverse Romans, vers le 19 ou le 20 décembre, entraînant la désertion de très nombreux volontaires. A son arrivée à Montélimart, l’unité ne compte plus que 150 hommes. Des permissions ont également été données, certains de ces hommes, dont un petit savoyard recueillis par le Capitaine Claude Nugues s’enrôleront dans le 9ème bataillon de la Drôme alors en formation.
1793 :
Le bataillon cantonne à Anot, Digne et Colmars dans les Basses-Alpes et comprend encore 587 hommes8. Il participa ensuite au siège de Toulon.
Embrigadement/amalgame :
1ère formation :
La 118ème demi-brigade de bataille fut formée le 22 octobre 1793, devant Toulon ,d’après Belhomme, mais le 3 avril 1794 selon Louis Susane. Elle se composait du 2ème bataillon du 59ème régiment d’infanterie, 2ème de la Drôme et 3ème de l’Isère.
2ème formation :
Le 15 mars 1796, la 118ème de bataille devint la 32ème demi-brigade de ligne, de l’armée d’Italie.
État-major :
Lieutenant-colonel Jean Borthon de La Motte d’Auxonne en Côte d’Or, 36 ans.
Lieutenant-colonel en second Antoine Guédy de Lille de Biol en Isère, 68 ans.
Quartier-maître trésorier François Chodier de Peyrins, 21 ans.
Compagnie de grenadiers : capitaine Claude-Pierre Nugues de Romans, 21 ans. Frère du futur général Cyr Nugues, chef de bataillon en 1799, et tué la même année à la bataille d’Aboukir en Égypte.
1ère compagnie d’Hostun, Châteauneuf et Saint-Paul, capitaine André Allemand de Saint-Nazaire-en-Royans, 24 ans.
2ème compagnie de Moras et Saint-Romain d’Albon : capitaine Joseph-Pierre Alizon de Moras, 24 ans.
3ème compagnie de Die : capitaine Victor Borel de Die, 20 ans.
4ème compagnie de Saint-Vallier, Montrigaud et Montmiral, capitaine Jean-Antoine Cany de Saint-Vallier, 40 ans.
5ème compagnie de Bourg-de-Péage, Saint-Paul et Montmiral : capitaine Marc Girard de Bourg-de-Péage, 34 ans.
6ème compagnie de Saint-Donat et Peyrins : capitaine Jean-Baptiste-François-Benoit Maisonneuve de Saint-Donat, 24 ans.
7ème compagnie de Clérieux et Hauterives : capitaine Charles Chirol de Chanos-Curson, 39 ans.
8ème compagnie de Romans : capitaine Jean-Nicolas Arnaud de Romans, 38 ans.
Portraits :
Jean Borthon de La Motte, originaire d’Auxonne en Côte d’Or, né vers 1755, il servit avec Bonaparte au 4e régiment d’artillerie, ci-devant de Grenoble. Il fut lieutenant-colonel en premier du 2e bataillon de volontaires de la Drôme (octobre 1791), avant d’être nommé agent au Comité de Salut Public, et adjoint aux députés Le Bas et Peyssard pour l’organisation et la formation de l’École de Mars (1794).
Jean-Laurent Dalve originaire de Peyrins, s’enrôla au 2ème bataillon de la Drôme et élu sous-lieutenant à la 6ème compagnie. Il écrivit une lettre à sa famille le 15 janvier 1792 :
« Je suis content, si j’étais secondé par 22 autres volontaires que doit fournir la municipalité de Peyrins, ayant la bravoure et le courage dont je donne des preuves si sincères, je le serais bien davantage ; mais, ô lâcheté, ô infamie, les grenadiers que cette municipalité a fournis, ont déserté, ainsi que la moitié de ses fusiliers : ces lâches ont abandonné leur drapeau dans un moment où nous avions besoin d’eux, puisqu’on nous envoie par renfort un escadron de Cavalerie des dragons de Lorraine, dans un moment où se forment des orages et des tempêtes nécessités par la mésintelligence qui règne entre les citoyens de cette contrée et par les ordres que les commissaires civils députés par le Roi y ont donnés pour le désarmement général et pour la formation d’une nouvelle municipalité en cette ville, nous devions être 23 volontaires, nous n’avons jamais été que 12 à 16 »9.
Claude-Pierre Nugues, né à Romans le 27 octobre 1770, fils d’un négociant aisé, entré au collège de Navarre à Paris où il fait de brillantes études et remporte le 7 août 1788, le prix d’honneur de l’université, un prix de grec et un accessit d’amplification française. Il étudie la danse, l’équitation, la musique, et les armes. Le 21 août 1789, après avoir assisté aux événements de juillet, et peut-être participé nous dit Michel Garcin, il revient dans sa ville natale et s’inscrit au Club des amis de la Constitution de Romans. Il y prononce plusieurs discours remarqués, et s’engage en octobre 1791, comme volontaire. Ses camarades l’élisent rapidement capitaine de la compagnie de grenadiers du 2ème bataillon de la Drôme. Sous les armes, il écrit de longues lettres à son père et à son plus jeune frère. « Nous sommes ici pour garder une parfaite neutralité, pour faire exécuter les lois et pour faire cesser les querelles domestiques des habitants, bien loin d’y entrer nous-mêmes ».
Étienne-François-Raymond baron Pouchelon, né à Romans dans la Drôme le 25 octobre 1770. Sergent-major au 2ème bataillon de la Drôme (12 octobre 1791), il servit à l’armée des Alpes (1792 à 1793), quartier-maître trésorier du bataillon (29 juin 1793), lieutenant en 1er à la compagnie de canonniers du bataillon (14 avril 1794). Il passa à la 118ème de bataille (janvier 1795), comme quartier-maître trésorier, puis de là dans la 21ème de ligne provisoire (4 mars 1796), qui devint la 32ème de ligne par tirage au sort (25 mai), armée d’Italie10. Il servit à Montenotte (12 avril 1796), Lodi (10 mai), puis aux sièges de Milan, Vérone, aux combats de Lonato (3 et 4 août), Saint-Georges, Caldiero (12 novembre), Arcole (15-17 novembre), Rivoli (14 janvier 1797), au passage du Tagliamento (16 mars). Il servit ensuite en Suisse, armée d’Helvétie (1798), puis à l’armée d’Orient, notamment à la prise de Malte (11 et 12 juin), puis d’Alexandrie (2 juillet), aux combats et batailles de Chebreiss (13 juillet), des Pyramides (21 juillet), à la prise d’El Arisch (8-19 février 1799), de Jaffa (3-7 mars), au siège de Saint-Jean d’Acre (20 mars-21 mai). Il y fut blessé d’un coup de feu qui lui traversa la joue gauche (30 mars 1799). Nommé chef de bataillon (29 mars 1801), il rentra en France. Nommé major du 33ème régiment de ligne (décembre 1803), il servit au camp d’Ostende, et commanda un régiment provisoire de dragons à pied (septembre 1806). Il servit à Iéna (14 octobre), blessé à Nasielk (24 décembre) colonel du 33ème de ligne (7 janvier 1807). Il servit dans la 2ème division Friant, du 3ème corps en Pologne, officier de la Légion d’honneur (juillet), il reçut une rente de 4 000 francs, et fut fait baron de l’Empire (mars 1808). Il servit ensuite à la brigade Hervo, division Friant (1809), puis brigade Gilly, en Allemagne et combattit à Eckmühl (21 et 22 avril) et Wagram (6 juillet). Il se trouva en garnison dans le Mecklembourg (1811) et en Poméranie Suédoise (1812). Il servit en Russie avec la division Friant, général de brigade (8 octobre), employé au 1er corps de la Grande Armée, il servit sous Davout. Il servit durant la campagne de Saxe (1813), commandant la 1ère brigade, division Philippon, 1er corps de Vandamme, il fut blessé d’un coup de feu à la main gauche à Kulm (30 août 1813), puis à Leipzig (18 octobre). Il rentra en France pour soigner sa blessure. Employé à la division de réserve Musnier à Grenoble (janvier 1814), il servit à l’armée de Lyon d’Augereau, s’empara de Nantua (20 février), servit au combat de Saint-Julien (1er mars), à celui de Mâcon (11 mars). Il obtint un congé d’un an, pour se rendre en Pologne (octobre), et ne put servir durant les Cent-jours. Il fut admis à la retraite (octobre 1816). Commandant du département de la Drôme (décembre 1830), il fut replacé en activité. Il mourut à Valence le 4 septembre 1831.
Documents :
« Nous commissaires et adjoints pour l’organisation des bataillons des gardes nationaux volontaires du département de la Drôme, procédant à la nomination des officiers et sous-officiers de la compagnie des cantons d’Hostun, Châteauneuf de Galaure et Saint-Paul-les-Romans, les volontaires ayant réunis chacun leur bulletin pour la nomination du Sous-lieutenant et le dépouillement du scrutin, fait, Monsieur Gastoud a été proclamé Sous-lieutenant, ainsi procédé et arrêté par nous dits commissaires, à Valence le 20 octobre 1791, l’an 3ème de la Liberté »11.
« Cavaillon le 4 décembre 1791, Le bataillon a reçu le drapeau que vous lui avez envoyé, la bénédiction en a été faite le lendemain matin au même instant : nous avons tous juré qu’il ne serait jamais pris. Nous avons fait route par le plus mauvais temps possible, aucun murmure ne s’est fait entendre, au contraire la gaieté semblait s’accroître avec la pluie, les mauvais chemins. Nous sommes arrivés dans nos quartiers, pays déchiré par des factions ; on nous y avait peint comme des brigands, l’effroi était tel que beaucoup de familles avaient émigrées ; nous avons la satisfaction de les journellement rentrer, d’apercevoir que les haines s’apaisent et que la tranquillité la plus parfaite règne. Le lieutenant-colonel, commandant le 2ème bataillon des volontaires de la Drôme, Borthon12».
Alors qu’il se trouvait en garnison avec le 3ème de la Drôme à Avignon, les hommes écrivirent à l’Assemblée Nationale :
« Législateurs vous avez désirés que des soldats protégeassent l’organisation du ci-devant Comtat, vos vœux et notre mission vont être remplis, nous osons croire que notre conduite répond à votre confiance, nous vous en demandons la récompense, envoyez-nous au combat. Fait à Avignon, le 26 juin l’an quatrième de la Liberté. Gouvion lieutenant-colonel commandant, Vaubois lieutenant-colonel, Argod capitaine, Nugues capitaine, Julien caporal…13».
A la suite d’une pétition du 2ème bataillon de la Drôme adressée au général en chef d’Anselme, ce dernier écrit aux administrateurs du département à Valence :
« Veuillez bien, Messieurs faire cesser toutes ces réclamations et donner tous vos soins à ce que les défenseurs de la Patrie soient vêtus et équipés le plus promptement possible. Dans les circonstances où nous nous trouvons, ces détails après la tranquillité publique peuvent être nommés les premiers devoirs des administrations14».
Article de Laurent Brayard
1 Belhomme, Histoire de l’Infanterie en France, tomes 3 à 4.
2 Michel Garcin, p. 56.
3 Michel Garcin, p. 60.
4 Journal militaire de 1792.
5 Journal militaire de 1792, p. 432.
6 Michel Garcin, déjà cité, p. 126.
7 Michel Garcin, déjà cité, p. 126 et 127.
8 Michel Garcin, déjà cité, p. 152.
9 Cité par Michel Garcin, qui cite lui-même Jean-Bouvier dans un article paru en juillet 1952 dans le bulletin de la société archéologique de la Drôme. Garcin, p. 71.
10 Selon L’histoire régimentaire et divisionnaire de l’armée d’Italie en vertu des ordres du général en chef Bonaparte par les chefs de corps ou les conseils d’administration, 1844, p. 208.
11 AD Valence, dossier L 867.
12 AD de Valence,n dossier L 342.
13 Cité par Michel Garcin, Archives Nationales, Paris, dossier D XV/67.
14 AD de Valence, dossier L 380.